Si vous dites Andrew Jackson, votre (ancien) professeur d’Histoire vous répondra probablement qu’il s’agit du 7ème président des Etats-Unis. Retournons vers le futur, un peu plus de 150 années après le double mandat du personnage : Andrew Jackson, compositeur et multi-instrumentiste canadien, réactualise le patronyme pour parrainer ce premier album aux thèmes engagés et constitué de pièces courtes voire même très courtes; pas moins de 15 titres pour une durée totale atteignant tout juste les 40 minutes. L’ambition d’un Rock à la fois éclectique et accessible est palpable, reste à voir si le soufflé ne risque pas de retomber avant la fin de la cuisson.
Pronostic à l’écoute ? Sans être d’une inédite créativité, les mélodies s’avèrent énergiques et tranchées, la structure narrative bien définie, de sorte que "Feral Familiar" témoigne in fine d’un discours musical faisant preuve d’une appréciable clarté. Tout au long de l’avancement du programme, l’album prend soin de diversifier les humeurs et de ponctuer son propos, qui reste essentiellement rock, mais qui évite ainsi la saturation prématurée du cortex auditif.
Le projet chemine sans obstacle d’un vieux Rock groovy ('Eugene Nixon', 'Enough Blood To Keep Em Coming') au galop beaucoup plus catchy d’un 'Mother Nature' généreusement électrisé, passe par des phases ouvertement bluesy, flirte avec le credo des rythmiques kilométriques et entêtantes ('So Much More' aux allures de Road Movie), ou prend son envol en nappes de rêveries épaisses et insouciantes, autant qu’inspirées ('Guitar Faye Reese'); voire même, s’essaye à l’exercice Comedy Rock, avec un certain succès (l’espiègle 'Better Than We Used To', plutôt réussi). "Feral Familiar" pousse la fantaisie jusqu’à sa série d’interludes en ambiances plus ou moins Sounds of nature, et même Space act ('Tragedy And Hope'); et tout ce petit monde de cohabiter en très bonne entente !
Au rang des réserves, on pourra signaler un vocal en manque d’identité, suivant les traces ici et là d’un Rock seventies de Lou Reed à Mick Jagger, ou des alternatives plus récentes d’un Interpol ou des Strokes. Une partition chantée bien maîtrisée, mais pas très innovante. Il est possible également de contester la texture de l’enveloppe sonore, plus ou moins démodée selon les morceaux, malgré une diversité instrumentale assez bien servie; ce choix de production, sans doute délibéré, n’est pas nécessairement le plus judicieux étant donné la relative modernité de la construction générale. Enfin, on regrettera que l’aspect rudimentaire de la rythmique et des phrasés de cordes électriques ne soit pas contrebalancé par davantage d’échappées solistes.
La ballade (musclée) de l’album, 'Another Day Of Misery', est assez symptomatique en la matière : elle embarque de très forts moments où le chant et la guitare se rejoignent en de splendides envolées épiques, mais ne peut s’empêcher de plomber l’atmosphère par un gimmick de basse tout droit sorti du 'Should I Stay Or Should I Go' des Clash - parmi ses déclinaisons déjà mille fois entendues.
Et pourtant malgré ces quelques penchants pour la facilité, ce "Feral Familiar" devient vite… familier. De sorte que l’on maintient volontiers la fonction repeat all du lecteur sur sa position on, pour que la séance s’enchaîne sur elle-même. Amateurs de Old Rock relooké, à vos casques : ne passez pas à côté de l'essai d'Andrew Jackson, transformé de fort belle manière.