Le chant est en anglais, la couleur ténébreuse de son Rock rappelle un peu celle des atmosphères du Prog’ germanique, et si ce n’était son patronyme et son CV déjà bien connus de la scène musicale internationale, il serait assez difficile d’identifier d’emblée le quintet de Belladonna comme appartenant à la botte italienne. La formation est née en 2005 en la mythique cité de Rome, à l’initiative de Luana Caraffa (au chant) et de Dani Macchi (à la guitare); 3 albums plus tard, nos italiens ont déjà parcouru un joli chemin sur les sentiers du succès. Quelle est donc leur botte… secrète ?
S’agissant de ce nouvel album, la réponse est, tout simplement, qu’il n’y en a pas. Belladonna pratique un Rock noir direct, tombant efficacement dans l’oreille, et globalement dénué d’artifices. Selon les préférences de chacun, il est possible de regretter la méthode ou au contraire d’y adhérer.
Les arrangements acoustiques (au piano notamment) sont bien réalisés, sans jamais être en mesure de détourner (ou d’attiser?) l’attention de l’auditeur; l’orchestration est généreuse, et ne perturbe pas la cohésion rock de l’ensemble (à l’instrumentation usuelle, s’ajoutent le piano, des cuivres, de discrètes mais prégnantes sonorités de violon et violoncelle, et même un peu d’harmonica).
La narration s’appuie beaucoup sur l’usage des breaks, sous diverses formes : thèmes, phrasés, rythmique, inflexions émotionnelles (notamment, plusieurs moments portés par d’envoûtants cœurs atmosphériques). Le vocal de Luana pour sa part donne toute la mesure de sa contribution à l’impact stylistique de ce type de production, avec son timbre légèrement éraillé, oscillant entre intonations rocks et R’n’B, à la manière des Tina Turner ou Teena Marie, par exemples. Une approche opportune, à défaut d’être nouvelle; même si, par moments, on a le sentiment que la chanteuse en fait un peu trop (les tirades de 'Damn Your Love' avouent les limites de cette tessiture, dans les registres criards).
L’album affectionne particulièrement les mid-tempo à la musculature renforcée ('Morning Star Blues', 'My Sweet Nepenthe', 'You And I Are One', 'Be My Star', 'Violet The Light', ce dernier insufflant une petite touche lumineuse dans un ensemble très sombre et parfois psychédélique), un peu moins les cavales rythmiques ('Stiletto', dont l’offensive est appuyée d’une impétueuse course de la basse), et parsème son cheminement de ballades emphatiques, aux dominances oniriques ('A Pyromantic Sonnet', 'Song For Tania'), voire onirico-romantiques ('I Feel Life', au timbre très acoustique). Cerises sur le(s) gâteau(x), les moments plus calmes, focalisés sur les plages courtes et tour à tour mélancoliques ou planants, permettent de préparer et de fluidifier les transitions, d’une humeur à une autre ('Ballerina', 'My Forlorn Flight'…). Une construction classique, mais qui porte ses fruits.
Finalement, on ne peut guère reprocher à cet album que le défaut de sa qualité : une homogénéité de ton et de style presque trop compacte. Les morceaux s’enchaînent comme à la parade, certes agrémentés des ponctuations précitées, mais sur la longueur on attend le moment de rupture, on guette le morceau-surprise qui ne vient jamais. S’il fallait noter "And There Was Light" comme une dissertation scolaire, on pourrait dire qu’il s’agirait d’un très bon travail, parfaitement structuré, mais souffrant d’un petit manque de fantaisie. Ce qui ne l’empêchera pas de trouver son public, aucun doute sur ce point.