Rarement un groupe aura, comme Alias Eye autant enthousiasmé la rédaction de MW (pour ses deux premiers albums, “Field of Names” et “Different Point of You”), puis suscité autant de déception (“in Focus”, paru il y a un peu plus de quatre ans). C’est dire que cette nouvelle production (“In-Between”) est attendue avec une impatience mêlée d’inquiétude. Annoncé comme un “Field of Names” avec un versant plus heavy, de quel côté se placera cet opus ?
Le titre d’ouverture rassure : ‘Arabesque’ renoue avec le côté mélodique et les arrangements précis du groupe, l’exactitude du placement vocal de Philip Griffiths se mariant avec bonheur aux mélodies ciselées (le pianiste Vitas Lemke, un des principaux compositeurs, ayant quitté le groupe, les titres sont signés de l’ensemble du groupe pour toutes les musiques). Cette entame, en délivrant le meilleur titre de l’album, est ainsi une excellente mise en bouche.
Pour la suite, le constat est hélas moins enthousiasmant, même si Alias Eye évite les fautes de goût commises lors du précédent album. Mais on ne retrouvera que par éclats ce délicat équilibre qui faisant le charme d’antan : ainsi ‘Take What’s Mine’ trouve des petits airs de Supertramp, ‘Time Machine’ s’autorise un gros clin d’œil à ‘Clown’s Tale, et ‘In-Between’ se plaît au frontières du jazz, un registre dans lequel Alias Eye a excellé.
De toute évidence, le groupe cherche à renouer avec les mêmes recettes, mais il n’y réussit que partiellement. Et c’est ici que nous reparlons de la guitare : moins distordue et plus en arrière que dans “In Focus”, elle garde quand même des velléités agressives qui détournent la musique d’Alias Eye de son fragile équilibre : inutilement distordue sur l’intro de ‘Break What We Know’, volontiers trop démonstrative dans ses effets dans les soli (‘Time Machine’, ‘Distant Memories’) ... Matthias Wurm semble privilégier la virtuosité au feeling : il tutoie le shred dans ‘Indentured Pride’, mais manque de finesse par exemple sur ‘The Blink of an Eye’. Or ce n’est pas la virtuosité qui nous a emballé dans les premières œuvres, mais bien la sensibilité, et il apparaît que le groupe n’arrive à rejoindre cet état que partiellement, malgré une sérieuse remise en question.
Ne boudons quand même pas notre plaisir. Si “In-Between” est un album très honorable qui délivre de bons moments de musique, il reste entre deux rives. La magie arrive encore à affleurer sur 'Arabesque' ou 'Take What’s Mine', mais la spontanéité qui avait tant marqué leurs deux premiers efforts n'est pas aussi palpable. Mais peut-être sommes nous trop nostalgiques...