L’équipe de Simple Minds aura frappé très fort avec les deux albums studio antérieurs, "Once Upon A Time" et "Street Fighting Years", ainsi qu’avec le fantastique "Live In The City Of Light" de 1987. Mais le début des années 90 marque le crépuscule de la New-Wave ayant enflammé les bandes FM lors de la décennie précédente. 1991, c’est par ailleurs le départ de Michael MacNeil, claviériste et compositeur à part entière, l’un des tournants de l’histoire de la formation - et reconnu comme tel par Jim Kerr. Les Ecossais feront de leur mieux pour reconduire le flambeau, mais admettront que la prestation de Mick aura toujours fait défaut par la suite.
Dans ce contexte où peuvent fuser les doutes, qu’attendre de cet enième opus ? Envers et contre tout, les deux leaders croient encore et toujours en leur musique, et ils ont raison : la griffe de Simple Minds est immédiatement reconnaissable (les compositions sont presque toutes signées Kerr/Burchill), et elle l’est de manière fort talentueuse sur l’enchaînement des trois premiers morceaux. Mélodies percutantes et arrangements raffinés, rien ne manque pour l’entame de ce "Real Life", dont l’offensive est confiée au titre éponyme. Le ton est donné, l’orientation semble impulsée avec 'See The Lights', puissant comme l’ouragan et sage comme un songe philosophique, un élan que confirme le mid-tempo de 'Let There Be Love', aérien et formidablement épicurien. Le vocal de Jim est toujours aussi convaincant, quelle que soit la tournure émotionnelle adoptée.
Malheureusement, l’arsenal épuise assez vite ses munitions après cela. 'Woman' est bien écrit, bien interprété, mais annonce la venue du marchand de sable; cette quatrième plage semble s’éterniser, alors que sa durée est tout à fait standardisée. 'Stand By Love' va brièvement ranimer la flamme du démarrage, avant que la verve qualitative ne se contente d’une combustion à l’étouffée, sur la suite du programme. 'Let The Children Speak', 'Ghostrider' ou 'Travelling Man' ne déplairont pas aux fans de cette impétuosité qui colle si bien au fringant équipage, mais il faut pourtant admettre que la composition taquine ici les rythmiques convenues et les menus réchauffés. L’ensemble se laisse écouter, sans que l’enthousiasme ne se réveille sincèrement.
Avec les temps nouveaux, la production évolue aussi. Tout en continuant à s’appuyer sur une sonorité favorisant les contrastes instrumentaux, "Real Life" donne davantage d’importance à la basse et aux guitares, au détriment des claviers qui œuvrent essentiellement à l’arrière-garde. C’est un peu la coloration tonale acquise par la nouvelle nouvelle-vague, un rhabillage qui sera également adopté par Tears For Fears, pour donner un exemple typique, à partir de "Elemental" en 1993.
Finalement, que penser de ce projet de vie réelle signé par Simple Minds ? Certains albums sont difficilement dispensables, en raison de quelques perles y prenant place. "Real Life" est de ceux là. Sur la durée, on a tendance à se laisser gagner par la lassitude, mais sa première partie, à elle seule, suffit à lui assurer un mémorandum parmi les plus honorables. Un album duquel seront tirés pas moins de 4 singles, dont les trois titres en tête de liste; sans surprise!