Si Moebius Cat ne vous rappelle rien, apprenez qu'il s'agit d'un groupe venu du Canada. Enfin, groupe si l'on veut. Il s'agit plutôt d'un rassemblement d'humains tâtant de divers instruments, rendu possible grâce à la magie d'Internet, autour d'un artiste ayant eu un jour l'envie de concrétiser sur support physique ses idées musicales. Ledit artiste, Roman Bershadsky a donc fait appel à candidature via sa page Facebook. Le line-up est ainsi majoritairement constitué d'amateurs, seuls Karl Mohr et Jodi Krangle ayant une réelle expérience professionnelle. Autre particularité, Moebius Cat possède un membre dont la participation semble se limiter aux textes, comme un Pete Sinfield aux débuts de King Crimson ou un Bernie Taupin aux côtés d'Elton John. Sauf que David Graham ne signe que trois textes sur les douze titres de l'album, c'est peu.
Sur son site officiel, Moebius Cat qualifie son style comme une fusion de musiques darkwave, progressive, expérimentale, world, gothique éthérée, électronique et néo-classique. Le propos est certes ambitieux mais légèrement démesuré. Si le côté world, et même pop-rock dans bien des cas, est largement présent, si certains titres comme 'Dance Goes On' ou 'Waltz With a Vampire' dégagent des effluves darkwave et gothiques, le côté expérimental se limite à quelques effets de style, et ce n'est pas parce qu'il y a des synthés que la musique peut être qualifiée d'électronique, pas plus que les violons ne lui donnent le label néo-classique. Quant au côté progressif, il est inexistant.
Non, plus simplement, Moebius Cat interprète un répertoire de chansons pop-rock aux mélodies agréables, assez nostalgiques et aux tempos relativement lents. Les compositions sont plutôt réussies, l'interprétation instrumentale est honnête, les différents solos ne resteront cependant pas gravés dans les mémoires. Si l'ajout d'instruments "exotiques" tels un violon, un accordéon, une flûte ou un sitar confère une atmosphère tantôt orientale, tantôt d'après-guerre, tantôt tzigane, les claviers et guitares restent en retrait, servant la plupart du temps de simple fond sonore. Les percussions (programmées ?), même si elles sont plutôt discrètes, deviennent lassantes par la monotonie de leur jeu.
Le groupe utilise trois chanteurs masculins dont l'un a le même timbre de voix que David Bowie ('Better Days Than These', 'River', 'Dance Goes On'), à se demander si le grand David n'a pas fait un détour par Toronto. L'autre moitié des titres chantés est interprétée par la voix chaude et sensuelle de Jodi Krangle qui rappelle par moments Joan Baez. Sa voix colle bien aux musiques et se déguste avec délice. Seuls deux titres sont entièrement instrumentaux : 'Waltz With A Vampire', valse sinistre et bancale, idéale pour servir de thème à toute maison hantée qui se respecte, et 'Farewell Guru', musique d'ambiance orientalisante sans grand intérêt.
Sorti en 2010 et réédité en 2012, "End Of Time" est un recueil de chansons qui s'écoutent avec plaisir, même si l'album fait preuve d'une linéarité qui confine parfois à la monotonie et que le parti-pris de rester dans un mid-tempo alangui donne à la longue l'impression d'un manque de dynamisme. Les belles parties vocales, les saillies du violon et l'atmosphère légèrement rétro et sombre épicent cependant suffisamment cette musique pour permettre de passer un agréable moment.