En ce début des années 90, et malgré plusieurs disques de qualité, Motörhead peine à trouver un second souffle commercial. Les médias le boudent un peu, restant bloqué sur "Overkill" ou "Ace Of Spades", et ses labels, qui ne lui ont pas facilité la tache, peinent à le promouvoir comme il le mérite. Pour fêter ses 20 ans, la bande à Lemmy signe chez le dynamique SPV et balance un 12ème album, "Sacrifice", à la pochette, toujours signée par Joe Petagno, à la fois guerrière et provocante et à fort caractère sexuel. Cet album va s'avérer être un des plus brutaux et métalliques de l'histoire du groupe. Porté par un Mikkey Dee dont la batterie fait des ravages par son omniprésence, "Sacrifice" est un disque âpre, sale et colérique, sans guère de temps morts ni de moments plus calmes, et doté d'un son très rugueux.
Lemmy semble décidé à en découdre et à prouver à la nouvelle génération qu'il faut encore et toujours compter avec la tête de moteur malgré les années, et que cela n'est pas prêt de changer. L'album démarre d'ailleurs avec un "Sacrifice" tonitruant, dominé par la batterie. Ce titre est très rapide, sonnant comme un coup de poing et est doté d'un refrain simple et efficace qui en fait le tube de l'album. Ensuite avec "War For War", "Make' Em Blind", "Dog-Face Boy", ou "All Gone To Hell" et "In Another Time", l'album compte pas mal de titre purement heavy métal, loin du rock'n'roll habituel, efficaces certes, mais parfois un peu étouffants tant le son est crade et l'ambiance très lourde. Ce n'est sans doute pas ce que Motörhead a proposé de mieux dans sa carrière mais cela frappe dur et juste et cela était sans nul doute le but de ces titres.
Mais c'est avec "Sex And Death", redoutable titre aux frontières du punk et au refrain très entrainant, et "Over Your Shoulder", très lourd mais plus classique pour le groupe grâce à un refrain très rock plus facile à retenir, que le groupe réussit le mieux son coup. Ces deux titres se détachent comme de possibles futurs classiques aux côtés de "Sacrifice". Il ne reste finalement que "Make Them Blind" pour revenir aux sources rock'n'roll. Petit brulot avec piano et saxophone, la chanson est très dansante et fait son effet servant de parfaite récréation au milieu de toute cette noirceur.
Malgré ses défauts et ses aspects anti-commerciaux, "Sacrifice" va pourtant être, assez ironiquement, l'album du renouveau commercial et médiatique d'un Motörhead que les médias et le public semblent redécouvrir. On ne le conseillera pas à ceux qui connaissent encore mal le groupe, mais il montre une autre facette d'un groupe loin d'être aussi prévisible que certains veulent le croire. L'aspect métallique de l'ensemble aurait pu rebuter les fans du groupe mais l'ensemble est assez cohérent et n'a pas trop souffert des effets du temps, confirmant toute la classe de la bande à Lemmy.