Après le chanteur Rhett Forester (mort en 1994) et surtout Guy Speranza (en 2003), dont le premier fut l'éphémère successeur entre 1981 et 1984, c'est au tour du guitariste Mark Reale de nous quitter. Il était le dernier membre originel de ce groupe très sous-estimé qu'est Riot, dont le dernier album au titre prémonitoire, Immortal Soul est sorti il y a quelques mois et dont l'étonnante qualité a permis de nous le rappeler à notre bon souvenir.
Mais il faut bien avouer qu'entre les sempiternels changements de line-up à répétition voyant les Américains accueillir des mercenaires tels que les batteurs Bobby Rondinelli (Rainbow et beaucoup d'autres encore) ou John Macaluso (Yngwie Malmsteen, Ark...) et même le hurleur de Satan's Host et de Jag Panzer, Harry Conklin , avec lequel ils n'enregistreront d'ailleurs aucun disque, un split temporaire au milieu des années 80 et par la suite une trajectoire en dents de scie, Riot n'a jamais vraiment réussi à transformer durablement l'essai d'une première partie de carrière prometteuse, le temps de trois galettes mémorables : Rock City (1977), Narita (1979) et plus encore Fire Down Under que d'aucuns considèrent à raison à la fois comme son apogée et comme une des pierres angulaires du Heavy-Metal des eighties. Tournant avec les plus grands d'AC/DC à Molly Hatchett en passant par Sammy Hagar, et participant à la fameuse première édition du festival Monsters Of Rock à Castle Donington en 1980 (avec, excusez du peu Scorpions, Judas Priest et Rainbow), dont il faut rappeler que celle-ci est née de la volonté de Ritchie Blackmore de terminer en beauté la tournée Down To Earth, le groupe est alors aux portes du succès.
Et à l'écoute de ce troisième côté de ce triangle magique, dont la pochette reste encore aujourd'hui dans toute les mémoires, on comprend mieux pourquoi. Clairement arrimé à la NWOBHM, Riot signe un Heavy-Metal remuant, qui doit alors autant au timbre puissant de Guy Speranza qu'aux duels de la paire formée par Mark Reale et Rick Ventura, lesquels impriment une généreuse énergie à des compos aux teintes variées qui s'accrochent à la mémoire. Tour à tour épique, à l'image du beau "Altar Of The King" à l'intro délicate qui n'est pas sans évoquer un Manilla Road, lancinant (l'étonnant "Feel The Same"), lourd parfois ("Outlaw" et sa rythmique appuyée), rapide le plus souvent, du célèbre "Swords And Tequilla" à "Run For Your Life" ou "Don't Hold Back", il faudrait vraiment être de (très) mauvaise foi pour ne pas reconnaître les qualités de ce Fire Down Under qui, en dépit de son grand âge (pour le genre), a plutôt bien survécu aux affres du temps, généralement impitoyable, preuve en est (encore) de sa valeur.
Le départ de Guy Speranza la même année amorcera malheureusement une nette érosion commerciale et ce, malgré une poignée de bons albums tels que Thundersteel en 1988 ou Inishmore dix ans plus tard. R.I.P. les gars...