Composé - pour la moitié - de membres d’un obscur groupe de Black Metal, Funeris Nocturnum, auteur de trois méfaits dont le poétique Pure Satanic Blasphemy, Swallow The Sun livre en 2003 son premier album. Et pour un essai, il s’agit d’un véritable coup de maître ! Boosté par un son gigantesque et écrasant, The Morning Never Came se pose d'emblée comme un classique instantané du Doom-Death mélodique. A la finlandaise donc !
Huit titres, huit bombes à la fois épiques et sombres, belles et furieuses. Comment des musiciens végétant en seconde zone ont-ils pu pondre du premier coup un disque aussi impressionnant de maîtrise ? L’eau des lacs scandinaves possède peut-être des vertus inconnues de par chez nous. En tout cas, même si le groupe n’invente rien, s'inscrivant dans le sillage de Rapture par exemple, il a parfaitement assimilé les éléments requis pour vomir un bon Doom-Death des familles. Les tempos ont la lourdeur d’un Panzer, la voix d’outre-tombe, forcément au rendez-vous, vibre du son des abysses et vous entraîne avec elle dans les arcanes de la dépression.
Mais comme souvent chez les Finlandais, la mélodie n’est jamais mise en jachère. De fait, grâce à des nappes de claviers judicieusement égrenées et des guitares qui tissent de superbes atmosphères, un peu comme le Katatonia des débuts (le meilleur ?), l’ensemble demeure toujours digeste et accessible (pour du Doom s’entend !), à l’image des sublimes "Out Of This Gloomy Light", "Silence Of The Womb" et sa lumineuse voix claire en parfait contraste avec les grognements de gargouilles caverneux, ou le monumental "Hold This Woe". Swallow The Sun est parvenu à atteindre l’équilibre, pas si simple à trouver d’ailleurs, entre dépression et beauté. Les ambiances se révèlent glaciales et sourdent un profond désespoir en même temps qu’une tension dramatique énorme, mais recèlent aussi une majestueuse beauté, froide certes à l'image des paysages qui l'ont vu naître, mais incontestable néanmoins.
Le groupe parviendra-t-il à égaler ce premier opus ? Rien n’est moins sûr ! Enfin, il reste attaché pour l'amateur, à tous ces escadrons de flagellants qui ont déversé leur mélancolie durant la première moitié des années 2000 et dont l'épicentre fut le principal fournisseur en spleen, le label Firebox, alors encore à ses débuts, qui ne cessait de dénicher des suicidaires tous plus déprimants les uns que les autres (Tyranny, Pantheist, Until Death Overtakes Me...) : bref toute une époque, un peu révolue comme souvent, quand bien même la Sainte Chapelle continue d'accueillir les pèlerins cependant que Swallow The Sun s'il a depuis évolué, ait toujours demeuré fidèle à ses racines Doom.