4 ans après un "F.U.C.K" qui avait relancé la machine avec un gros succès commercial confirmé par la sortie du "Live : Right Here, Right Now", Van Halen est de retour avec ce "Balance" à la surprenante pochette. Que peut bien signifier cet enfant déchiré en deux, façon siamois ? S’agit-il d’un questionnement quant à l’identité artistique du groupe, hésitant entre ses facettes expérimentales et commerciales ? Probablement, mais il est également difficile de ne pas imaginer une référence aux problèmes internes du célèbre quatuor, entre des frères Van Halen souffrant de problèmes de hanche pour Eddie et de vertèbres pour Alex, et un Sammy Hagar ne supportant plus le diktat du leader-guitariste au point de partir enregistrer ses vocaux à Vancouver an compagnie de Bruce Fairbairn pour échapper à ses incessantes remarques.
Voilà qui peut expliquer l’ambiance majoritairement sombre de ce nouvel opus qui voit le combo tenter quelques expérimentations compensées par des retours en arrières semblant être là pour le rassurer. C’est ainsi que le riff de l’introductif "The Seventh Seal" fait furieusement penser à celui de "Poundcake" pour un résultat malgré tout puissant et efficace. Van Halen se raccroche également à un bon vieux rock’n’roll des familles le temps d’un "Big Fat Money", pas original pour un sous mais irrésistiblement entrainant. Sur "Take Me Back (Déjà-Vu)", c’est carrément un riff de 20 ans recyclé par Eddie qui nous est resservi, alternant passages acoustiques et électriques, alors que le retour vers les origines est parfaitement illustré par un "Amsterdam" rendant hommage à la ville natale des frères Van Halen sur des bases rock et groovy. Rien de mauvais, bien au contraire, mais suffisamment pour laisser deviner les doutes et hésitations qui hantent les esprits des membres du groupe.
Pourtant, les prises de risque sont bien présentes sur "Balance" avec un degré de réussite inégal. "Can’t Stop Loving You" est un single tout ce qu’il y a de plus commercial, simple et mélodique avec un refrain hyper accrocheur et un petit clin d’œil à Ray Charles au passage, alors que la ballade "Not Enough" se veut dans le même esprit, mélancolique avec piano et section de cordes. A l’opposée, les intermèdes musicaux sombrent dans une expérimentation d’une totale opacité, en particulier "Strung Out" qui voit Eddie démonter un piano en frappant sur les cordes avec tout ce qui lui passe sous la main (balles de ping-pong, fourchettes, etc…) pour un coup final de 15.000 $. Voilà qui fait chère la minute 28 de bruitages ! Autre instrumental, "Baluchiterium" se veut aussi lourd que l’animal préhistorique auquel il se réfère, impression renforcée par une grosse section rythmique. A signaler que ce titre devait être chanté à l’origine et que Eddie a finalement remplacé la ligne de chant par une autre de guitare. Enfin, avec "Feelin’", Van Halen se frotte au style épique mélancolique avec changement de tempi et montée en puissance, le tout dans une ambiance toujours empreinte de tristesse.
Pas de quoi faire un mauvais album, mais une ambiance globale qui oblige à se questionner quant à l’avenir de Van Halen. Malgré une grosse production et quelques titres accrocheurs, "Balance" reste trop inégal et pousse certaines expérimentations trop loin pour s’installer au panthéon des albums d’un groupe qui ne réussit pas à masquer ses hésitations quant à la voie à suivre pour la suite de sa carrière.