Jane’s Addiction est un groupe un peu atypique. Régulièrement encensé par la critique qui lui a très vite collé l’étiquette de groupe culte dès la sortie de leur second album, "Ritual De Lo Habitual" en 1990, la bande à Perry Farrell n’avait pourtant à ce jour accouché que de 3 disques en 26 années d’existence. Et on ne peut même pas dire que cette rareté soit gage de qualité, car à l’exception de la galette précitée, et dans une moindre mesure de "Strays", le reste de sa production ne brille pas particulièrement. Que penser donc de ce dernier disque en date, qui nous arrive après une énième reformation et après le départ du bassiste (et co-fondateur du groupe) Eric Avery ? Le constat est très mitigé...
Une première écoute fait apparaitre un groupe très professionnel, très mature et bénéficiant d’un son excellent. Mais les écoutes suivantes ne concrétisent pas totalement ce premier sentiment, et l’on se prend rapidement à chercher en vain la folie, l’énergie et la passion qui habitaient Jane’s Addiction à ses débuts.
On reste quasiment en permanence dans le prévisible, dans le commun, dans le simple. Nulle trace de ces rythmiques décalés et inattendus qui faisaient le charme (tout autant qu’elles repoussaient certains) du groupe. Pas plus de trace des expérimentations musicales, pas toujours heureuses, mais toujours courageuses, que l’on saluait tout autant qu’on les redoutait. La chanson "Irresistible Force" est un bon résumé de ce disque : le morceau est très bien construit, très efficace, très actuel. On jurerait entendre la B.O. d'un film pour adolescents interprétée par Evanescence. Mais inutile d’y chercher la moindre aspérité, la moindre personnalité, Tout y est formaté, surproduit, aseptisé. L’inspiration et la créativité ont laissé place au savoir-faire et à la production.
Si le côté décevant de cet album l’emporte, il n’en comporte pas moins quelques (rares) bons moments. Ainsi, le chant sur "Splash A Little Water On It" est gorgé de chaleur, les guitares sont efficaces, et surtout (au risque de se répéter) le son est excellent. "Words Right Out Of My Mouth" nous donne le sentiment que le groupe a enfin retrouvé une boîte de Guronsan et qu’il se lâche un peu, mais l’illusion est de courte durée.
Il est à noter que l’album est ressorti en 2012 accompagné d’un second disque dans lequel on retrouve les anciens succès du groupe en version live. Si la qualité du son est là loin d’être parfaite, on y retrouve l’énergie et la folie du groupe, notamment lors d’un "Three Days" qui s’étire sur plus de 11 minutes. Mais globalement cet album est trop sérieux, trop propre, trop classique pour pouvoir convaincre une personne connaissant déjà le combo. Les amateurs de Rock légèrement musclé pourraient y trouver un intérêt (modeste). Mais il serait plus que surprenant que quelqu’un soit à même de fredonner un seul de ces airs dans seulement un an.