A-Sun Amissa est l’une des rares formations qui peut se targuer d’avoir, grâce à son titre et sa couverture, résumé parfaitement le contenu de son opus. Du moins la pochette affiche t-elle clairement le climat obscur, mystérieux et atmosphérique de leur post-rock instrumental à tendance shoegaze.
En effet, issu de la région de Leeds, où il fit ses premières armes au sein du combo d’ambient du nom de Glissando, ce trio de chercheurs, responsable de ce curieux objet, destinait ses efforts à «englober bourdonnements minimalistes, mouvements moderne-classiques et tendances avant-gardistes».
Autant une telle déclamation pourrait faire suspecter un bon mal de crâne, entre bizarreries et complexité à outrance, autant l’effet rendu se disperse d’avantage vers un dépouillement et une quiétude, certes relative, mais propice d’une certaine façon à l’évasion. Munis de guitares, violon et violoncelle à qui l’on fait dire tout et peut-être n’importe quoi par le prisme de pédales à effets, A-Sun Amissa parle un langage que l’on croirait celui de la nature. Cinq pavés comme la bande sonore du temps qui passe, inéluctablement. Le plan fixe d’une prairie sous un ciel pluvieux, un travelling sur un sentier par temps de brouillard, chacun peut en fait voir ce qu’il veut depuis cette insolite fenêtre. Mais l’impression prédominante se situe au croisement où apaisement et inquiétude se rencontrent, là où le flou artistique est le plus distinct.
A ce titre, "Desperate In Her Heavy Sleep" porte malheureusement très bien son nom car au plaisir de se laisser bercer par de longues ondulations sonores, ce bouillonnement tranquille qui laisse percer de temps à autres quelques samples ou arpèges de guitares, se substitue bien souvent une marche irrépressible vers l’assoupissement. Car dans de vastes terres où l’inspiration ne pleut jamais, c’est plutôt l’infertilité qui jaillit.
Derrière une apparente simplicité, c’est peut-être parce qu’elle est exigeante que la musique de A-Sun Amissa ne fédèrera pas forcément. C’est donc plutôt une conclusion en forme de point d’interrogation, le sentiment que les frontières que l’ont a cherché à franchir forment finalement des obstacles à la compréhension de la chose. Il va s’en dire que des amateurs du genre n’auront que faire de ces considérations. Quant aux autres, ils devront faire preuve d’une belle ouverture d’esprit pour apprécier au mieux cette conceptuelle entreprise.