Pour ceux qui seraient fâchés avec la géographie, rappelons que la mer baltique est une mer froide et peu profonde bordée par les pays baltes (logiques), la Russie, l'Allemagne, la Pologne, le Danemark, la Finlande et la Suède. Pourtant, même si leur musique rappelle par certains côtés la froideur de cette mer, les membres de The Baltic Sea n'ont rien de scandinaves puisqu'ils sont originaires des Etats-Unis.
"Through Scenic Heights And Days Regrets" enregistré en 2006 et produit en 2008 est leur premier opus. L'album est un mélange de post-rock mélancolique (pléonasme ?) et de passages d'une violence fulgurante, le tout saupoudré d'une pincée d'expérimental. Tous les titres débutent en douceur, sur des mélodies désenchantées interprétées par des guitares cristallines, parfois presque diaphanes, parfois semblant rebondir en boucle, et un chant haut perché. Puis, à un moment ou l'autre suivant les titres, la mélodie s'emballe, le rythme s'accélère, les guitares se saturent et la batterie se déchaine avant que tout ne parte en vrille sur des stridences et une musique déstructurée, puis ne retombe dans le calme morose du début.
Cette alternance de délicatesse et de frénésie furieuse fonctionne plutôt bien sur le titre d'introduction, 'Monswoon', qui captive facilement l'attention. The Baltic Sea évite certains écueils. Le mixage des instruments sur les temps forts est habilement dosé, évitant que la batterie ne noie tout sous ses roulements sauvages ou que les guitares n'occultent basse et chant. Les incursions expérimentales sont suffisamment brèves pour ne pas être ennuyeuses et mettent ce qu'il faut d'acidité pour n'en apprécier que mieux les passages plus mélodieux.
Néanmoins, l'utilisation par trop systématique de ce procédé crée cette sensation d'ennui sur la durée qu'il avait permis d'éviter au sein d'un morceau. La surprise du premier titre s'émousse au second et disparaît au troisième, le groupe ne pouvant s'empêcher de terminer chacun d'entre eux par un crescendo cataclysmique avec force guitares agressives et percussions envahissantes.
Le chant laisse lui aussi une impression mitigée. Todd Hutchisen a une voix de fausset que l'on confondrait presque sur les premières mesures de 'Monswoon' avec celle de Jon Anderson, même si cette impression fugace ne se confirme pas par la suite. Tant qu'il reste dans la retenue et le registre aigu, son timbre fragile s'accorde parfaitement avec l'atmosphère mélancolique de la musique. Mais son manque de puissance et d'amplitude révèle vite ses limites dès qu'il cherche à donner de la voix. Pire, il détone dès qu'il plonge dans le médium, évitant avec peine la fausse note, notamment sur 'The Everyday Separation' et 'Cry Aloud (Then Explain)'.
Cependant, et malgré ces défauts, l'album est loin d'être mauvais et plusieurs titres ('Monswoon', 'Carpenter', 'Dot.Violence') permettent de passer un agréable moment. Si The Baltic Sea arrive à gommer ces défauts de jeunesse, il possède le potentiel pour offrir un album où les "néanmoins" et "cependant" n'auront plus leur place dans la chronique qui lui sera accordée.