5 ans que nous n’avions plus de nouvelles discographiques de Jeff Healey, et encore, il s’agissait alors de "Cover To Cover", album de reprises qui ne nous avait pas totalement convaincus. Autant dire qu’il était grand temps pour le prodigieux guitariste canadien de nous offrir un nouvel opus plus personnel, "Feel This", son dernier exercice du genre, datant déjà de 8 ans. Mais à quoi s’attendre de la part d’un esprit aussi indépendant dont chaque album marque toujours une forte évolution par rapport à son prédécesseur. Blues, Rock, Hard ?
Bien qu’ayant quitté Bmg pour Eagle Records, label plus intimiste, Jeff Healey s’est entouré de pointures du genre pour l’aider à nous pondre 13 nouveaux titres, dont un représentant l’incontournable exercice de la reprise avec le délicat et semi-acoustique "Runaway Heart" de Marc Jordan. Principal acolyte du guitariste non-voyant pour cette occasion, Marti Frederiksen remarqué récemment pour sa participation à la relance de la carrière d’Aerosmith, et qui partage la production et l’écriture de 5 titres dont "Which One" et "Holding On" qui sont probablement les titres les plus puissants, renvoyant directement à l’époque de "Hell To Pay". Comme la plus grande partie de ce "Get Me Some", les autres titres œuvrent plutôt dans un style plus popisant dans le sens noble du terme. En effet, la mélodie est mise à l’honneur au sein d’une production aérée et dynamique, enrichie de refrains qui vous enveloppent et s’incrustent dans votre mémoire ("Hey Hey", "I Should Have Told You") pendant que les paysages défilent devant vos yeux, comme sur l’entrainant "My Life Story" composé avec l’aide de Stevie Salas.
Une fois de plus, Jeff Healey se montre convaincant en changeant de registre, même si sa guitare reste inimitable et s’il se permet tout de même quelques retours vers des terres Blues plus brûlantes, comme sur "Feel Better", lourd avec un refrain qui explose et un solo incandescent pendant lequel le maitre est épaulé de son prometteur élève Philip Sayce. A l’opposé, "I Tried", composé par Diane Warren, voit le génie se frotter à l’exercice de la ballade formatée pour les radios nord-américaines à grand renfort de piano et violons. Tout pour nous pondre un titre mielleux et sans âme, et pourtant le résultat est particulièrement convaincant, Jeff Healey faisant preuve de délicatesse et de profondeur. Des caractéristiques que l’on retrouve sur une fin d’album plus épurée pendant laquelle l’acoustique est souvent à l’honneur, que ce soit à l’occasion d’un "Macon Georgia Blues" enjôleur ou d’un "Rachel’s Song" écrit pour sa fille avec une émotion à fleur de peau.
Retour gagnant pour Jeff Healey et ses acolytes, Rockman et Stephen faisant preuve d’un investissement retrouvé. Il n’y a qu’à écouter le groove qu’ils impulsent dans "House Is Burning Down", hommage à peine déguisé à Jimi Hendrix, pour s’en convaincre. Voici une nouvelle démonstration du génie d’un artiste capable de toucher à presque tous les styles musicaux avec toujours autant de talent et de crédibilité, ainsi qu’une inspiration renouvelée.