1987 sera l’année de la confirmation pour le trio devenu duo nordiste. Les frères Lomprez accouchent de ce "Million Lights" qui, à l’image de sa pochette, est empli d’une noirceur dominante qui hante l’ensemble des compositions de cet opus.
Le post-rock industriel / cold wave de cette période est à son paroxysme et les groupes pullulent à tous les coins de rue (The Neon Judgement, Siglo XX, Skinny Puppy…) mais celui qui concentre les émotions est bien celui de Trisomie 21. Pourquoi un tel nom provocateur ? Les frangins se sont expliqués en son temps dans le magazine "Best" en précisant que ce choix avait été évident puisque, pour eux, les personnes atteintes par cette maladie sont quelque part plus sensibles et cette sensibilité se retrouvait dans leur musique.
Qu’attendre alors de T21 avec cet album ? C’est assez simple à résumer : une émotion intense portée par la voix si caractéristique de Philippe (toujours à la limite en terme de justesse) et les instrumentations d’Hervé aussi à l’aise avec les machines qu’avec les guitares, synthés et autres basses. La boîte à rythme a bien vieilli, et si des pas nous mènent à l’oubli sur le titre inaugural ce n’est que pour se sublimer sur le popisant (mais toujours noir dans le ton) "Sharing Sensation". Les nombreux effets sur les voix, les loops synthétiques, les textes parlés qui se perdent dans le lointain et les coups étouffés se focalisent sur un titre ("There’s A Strange Way This Morning ?") résumant en un coup le voyage proposé par le binôme.
Et si "Some 21 Miles From The Coast" perdure dans l’esprit, il est honnête de crier à la lumineuse capacité du groupe à ne pas calculer mais plutôt à chercher à transmettre cette immensité délirante sans esbroufe. La plage éponyme porte quant à elle, une froideur extrême encensées par les guitares passées à la moulinette des effets pour se finir sur une final des plus émotif.
Le rock de T21 ne peut donc pas plaire à tout le monde, et c’est tant mieux car, si le combo est encore en vie en 2012 (après plus de trente ans de présence ponctuée toutefois de longs silences) c’est qu’il y a bien une raison. Les nombreux extraits en bas de cette page vous aideront à aimer ou à haïr, mais une chose est sûr : T21 force à la réaction. Celle-ci peut apporter au groupe une fidélité sans faille (comme votre serviteur) ou carrément provoquer le rejet pour de multiples et bonnes excuses que personne ne cherchera à justifier. Alors, si finalement ce groupe vous interpelle, il est de bon ton de se procurer cet album puis, une fois celui-ci bien approprié, un petit retour en arrière avec "Chapter IV" deviendra la suite logique et nécessaire du parcours initiatique mais ceci est une autre histoire que je vous conterais plus tard.