Deuxième opus de ce groupe finlandais dont certains membres ont déjà un passé conséquent, notamment le chanteur Markku Kuikka qui a une longue carrière derrière lui et que l'on a pu entendre aux côtés de Lars Eric Mattsson et le claviériste de Thunderstone, Jukka Karinen, qui peut ici s'exprimer bien plus largement et avec finesse.
Le premier effort, intitulé "Dialog", il y a deux ans, avait révélé un groupe constitué d'instrumentistes compétents mais qui avait du mal à sortir des influences relativement classiques du metal progressif, avec en tête Symphony X et Dream Theater. "Dialog" bénéficiait d'un bon enregistrement, d'arrangements équilibrés entre claviers et guitare, avec de bonnes mélodies mais aussi pas mal de changements de rythmes et de parties de double pédale un peu convenues sur ces morceaux de durée moyenne sauf une longue suite épique.
"Ouroboros" est un album-concept basé sur l'histoire d'une relation amoureuse… Son début, son épanouissement, sa dégradation et sa fin. Les références parfois un peu trop visibles de "Dialog" sont bien moins nettes ici. Le groupe a annoncé son album comme un peu plus direct, mais à l'écoute des morceaux, disons plutôt que les morceaux sont davantage centrés sur les mélodies vocales et que les rythmes sont plus simples, la batterie un peu moins mise en avant et plus nuancée. L'album est aussi moins lourd dans l'ensemble. Les mélodies vocales, toujours au centre des compositions sont souvent assez fortes, voire splendides sur deux ballades. Le piano classique est assez présent (avec une très belle sonorité, d'ailleurs) et les orchestrations de synthés sont bien mises en valeur, ce qui n'empêche pas Sami Saarinen de délivrer des parties de guitare bien tranchantes, de belles harmonies et quelques soli très fluides aux côtés du clavériste dont le jeu soliste est lui aussi fort véloce.
Pourtant les trois premiers morceaux sont toujours assez rapides et puissants malgré des arrangements de claviers bien audibles. Rolf Pilve nous assène encore quelques parties de double pédale, des rythmiques hachées et syncopées un peu classiques mais globalement, la section rythmique a sensiblement évolué et dans le bon sens par rapport à "Dialog". La suite est bien plus intéressante avec notamment la ballade "Like a Dream" suivi d'un titre au piano solo ("Confidence and Trust") ! Markku Kuikka utilise toujours cette voix rugueuse et grave, puissante et très bien placée. Etrange de vouloir garder ce timbre éraillé et ce style quelquefois rugissant car on entend bien quelques lignes de chant clair ici et là, comme sur "Like a dream", preuve qu'il a d'autres cordes à son arc. Mais cette fois, il est accompagné par Anna Murphy (chanteuse d'Eluveitie), sur quatre titres interprétés en duo. Et la voix claire mais puissante de cette dernière est fort bienvenue, offrant un peu plus de diversité à l'album.
Le point culminant de cet opus est probablement la ballade "Flowers Die" et le long "Sail Away" qui forment un tout avec des reprises de thèmes issus du premier dans le second… L'atmosphère mélancolique, voire sombre et dramatique n'empêche pas les mélodies d'être très accessibles. Belle idée que de proposer des passages délicats au piano et de lentes montées en puissance… Status Minor devrait se débarrasser très vite de l'étiquette mal adaptée de groupe de "power metal". Il est cependant dommage que les vocaux restent particulièrement rugueux sur les passages les plus tendus de cette sombre histoire (sur "Stain" par exemple), détail qui pourra en rebuter certains…
"Ouroboros" est donc un album inspiré et qui possède beaucoup d'émotion et de profondeur. Les Finlandais ont su évoluer en l'espace de deux albums et n'hésitent pas à sortir un peu des sentiers battus avec des passages très calmes et sensibles. Même si l'album n'est pas révolutionnaire, Status Minor démontre sur ce disque un véritable sens de la nuance et à la fin du CD, l'envie d'y retourner est pregnante. Espérons que le groupe poursuive dans cette voie pour sortir du lot au sein d'un genre assez formaté et qui tend de nouveau à la surenchère sonore depuis quelques années.