Depuis de nombreuses années, une des amabilités couramment entendue au sujet du rock progressif concerne justement sa propension à ne plus coller à l’adjectif qui lui est associé, renvoyant à tort ou à raison selon les avis, à une stagnation héritée de la période dorée des 70’s. Que celui qui souhaite s’affranchir de cette image d’Epinal vienne aujourd’hui poser une oreille sur ce deuxième album d’IOEarth, groupe britannique formé autour du duo Dave Cureton / Adam Gough, et son regard sur le mouvement qui nous est cher en sera très certainement modifié.
Rarement en effet, un groupe nous aura délivré une partition aussi intelligente et aussi variée. C’est ainsi que l’on retrouve au fil des différents titres tous les courants traditionnellement en vigueur dans le rock progressif: parties symphoniques, passages néo, thèmes aux accents de world-music, section à la manière de Dead Can Dance (Drifting), digressions aux contours jazzy, fusion métallique portée par une voix féminine évoquant les Nightwish et autres Within Temptation, prog 70’s, voire même Krautrock pour les aspects répétitifs des mélodies, notamment dans la deuxième partie de Moments.
Mais, de la même manière que Rob Reed avait initié la démarche au travers de son projet Chimpan A, IOEarth introduit une grosse touche de modernisme dans sa musique, sous forme de sonorités de claviers de type Chill-Out/Ambient voire même techno ! Mélange incongru au premier abord, mais réalisé de façon magistrale par le groupe, et qui lui confère une tonalité unique en son genre.
Tout ceci ne serait bien entendu que vaine tentative de production musicale de qualité si l’inspiration mélodique ne se trouvait à la hauteur du plumage précédemment décrit. Et là, le moins que l’on puisse constater est que, tout du long de la grosse heure que dure ce deuxième album, l’auditeur se trouve emporté dans un tourbillon de thèmes aussi riches qu’accessibles, ce qui n’est pas la moindre de leurs qualités. Ecoutez donc les deux parties de Live Your Life, ou encore le fantastique Turn Away et son long final symphonique pour vous en convaincre.
Avec Moments, IOEarth nous prouve, si besoin en était, qu’après 45 ans d’histoire, le rock progressif possède encore de nouvelles voies à explorer, et ce pour le plus grand bonheur de tous ceux pour qui la musique reste d’abord et avant tout génératrice d’émotions. Précipitez-vous sur cet album, pendant que je m’en vais explorer son prédécesseur !