OHMphrey n’a pas bougé d’un iota depuis son précédent méfait, il y a trois ans. Mêmes membres chevronnés issus de deux formations, OHM et Umphrey's McGee, même plaisir à se réunir quelques jours pour expérimenter, improviser et enregistrer, et même propension à ne se fixer aucune barrière. Posthaste est un disque très rempli mais moins indigeste qu’OHMphrey, avec tout de même deux titres captés en live pour plus de trente minutes de jubilation.
Avec OHMphrey, on sait où on va. Soit on est allergique aux longs développements ponctuellement structurés, soit on adhère à l’esprit brut de la création, sorte d’instantané musical souvent brouillon mais qui laisse transparaitre quelques percées lumineuses. Et en effet, c’est cette matière épaisse et opaque de l’improvisation qui donne, comme par contraste, toute sa dimension aux instants magiques où le groupe s’agence parfaitement et s’exprime dans une sorte d’évidence.
Tordons le coup aux deux ovnis de fin de disque que sont "Firestarter" et "20/20", qui en plus de trente minutes de bonus live, exposent la face hermétique de ce groupe, celle pour laquelle l’alchimie n’opère pas. L’album a proprement parlé est beaucoup plus structuré et mélodique. Après un "Devils In The Details" aux accents jazz et improvisés, surgissent "The Sun Also Rises" au nom tout trouvé, et "TomBombadil", deux réussites qui illuminent le reste de l’album et ne nous font pas regretter d’avoir persévéré. Dans un mélange élégant de jazz-rock et funk, les cinq compères se sont trouvés et pas lâchés d’une mesure. A l’évidence, ces musiciens ne sont pas là par hasard. Le reste de l’album ne déçoit pas, plus particulièrement "The River Runs" qui commence lascivement pour balbutier rythmiquement et ainsi former un titre très original et non dénué de charme, ou "The Shoemaker’s Back" sur le même mode calme avant la tempête avec un chorus très mélodieux.
Si on oublie les deux bonus dispensables, Posthaste est un album inspiré et soucieux d’un minimum de cohérence. Effort bruitiste et pédant pour les uns, fruit pur de l’œuvre artistique pour les autres. Il ne faut pas écouter ce disque avec les mêmes référentiels que l’on emploierait avec un album 'classique'. Si vous n’êtes pas touché par l’expérience née d’une rencontre unique entre divers artisans de la musique, ce disque n’évoquera rien pour vous. Ou alors de la musique pour musiciens uniquement…