Ne vous fiez pas trop à son nom ou à celui de la majorité de ses chansons: Almara n'est pas un projet espagnol mais la nouvelle aventure de Lisa Pawelke, chanteuse emblématique du légendaire Faun, entre 1998 et 2008. Naviguant désormais en solitaire, la belle (également maîtresse de la vièle à roue), avec Outros Amores, s'immerge dans une culture à priori éloignée de la sienne, encore que c'est oublié que les Celtes ont essaimé jusque dans la péninsule ibérique (la Galicie), culture aux couleurs ensoleillées et romantiques qui sied finalement à merveille à son timbre cristallin.
Accompagnée par une poignée de musiciens remarquables, Lisa nous envoûte au fil de cette brise acoustique d'une poésie tranquille et reposante. Avec aisance, elle se fond dans un folklore hispanique aux couleurs ocres, peint par une guitare sèche teintée d'une mélancolie délicate (le très beau "Que Pude Ser"), des percussions discrètes et autres instruments traditionnels ("Vareda").
Et il y a surtout la voix de Lisa, cette voix magique, clé de voûte de compositions entièrement construites autour d'elle, même si on ne saurait ignorer la qualité des arrangements qui les enrichissent. Parfois presque a capella ("Ne m'oublie mie"), alternant l'espagnol avec le français voire l'allemand, elle nous guide à travers des montagnes crépusculaires. Lente imprécation aux arabesques orientales, "Por Que lloras Blanca Nina" illustre ainsi toute la tristesse funéraire d'une musique moins joyeuse que ce que ses atours folkloriques laissaient imaginer.
Loin d'une ambiance festive, Outros Amores se pare au contraire d'un voile profondément mélancolique, que tissent les lignes vocales de la maîtresse des lieux, d'une beauté tour à tour fragile ou grave, témoin le poignant "El Rey De Franca", que rehaussent des notes de vièle. Séduisante, Lisa est la narratrice envoûtante de récits que l'on devine dramatiques, oraisons funèbres plus que petites pièces enlevées. En cela, l'œuvre puise dans le désespoir lancinant et nocturne de la musique arabe traditionnelle dont, il ne faut pas oublier, l'Espagne, terre de syncrétisme culturel, reste profondément marquée.
Alors que nous aurions pu penser que de part son origine germanique et son passé au sein de Faun, Lisa Pawelke aurait poser ses valises du côté de la Galice, c'est bien vers l'Andalousie qu'elle puise son inspiration. Dans tous les cas, ce premier voyage d'Almara est une belle réussite à conseiller à tous les amoureux de chants féminins et de musiques acoustiques, meilleur même que le dernier album de l'ancien port d'attache de l'Allemande.