Pour leur nouvel album, les marathoniens du groupe polonais SBB ne sont pas allés chercher bien loin son titre. En effet, leur nouvel opus s'appelle tout simplement "SBB", et n'est finalement que le troisième à porter ce nom. Côté pochette, la simplicité est aussi de rigueur : elle présente les deux créateurs du groupe vus de profil, créateurs qui se trouvent également en être dorénavant les deux uniques membres, Apostolis Anthimos semblant désormais assurer les parties de batterie en plus de celles de guitare.
Si sur les albums précédents, le groupe hésitait entre chants anglais et polonais, il résout radicalement le problème en généralisant l'expérience tentée sur l'album précédent avec 'Swieto Droni' : Józef Skrzek ne s'exprime plus que par onomatopées, incantations et autres borborygmes, la voix s'apparentant à un instrument comme un autre, prenant sa part de solos au même titre que la guitare et les claviers. Musicalement, l'album est un mélange de jazz, de rock et de blues, subissant par moments des influences venues du Moyen-Orient ('Piwnica', 'Niemen') ou de l'Orient tout court ('Zwatpienie Lakisa', 'Lot Nad Chicago') et ne dédaignant pas faire des détours du côté de l'expérimental ('Seged', 'Memento'). Tous les titres donnent l'impression d'être moitié composés, moitié improvisés. Sur une trame de fond visiblement construite, fournissant au morceau son tempo et son caractère, chaque instrument soliste (voix comprise) vient égrener son chapelet de notes dans une apparente liberté. Seul le chaotique 'Requiem' paraît être totalement improvisé avec sa batterie arythmique, ses sons étirés et stridents de claviers et de guitare.
Les deux musiciens prouvent l'étendue de leur talent dans cet exercice toujours périlleux. Virtuoses, mais sans en faire de trop, ils font oublier leur technique derrière des mélodies qui coulent avec une étonnante facilité. Les improvisations ne tournent jamais à la démonstration mais font bien au contraire preuve de légèreté, d'innovation, tout en restant très mélodieuses. Un petit bémol néanmoins pour la batterie qui paraît en regard bien monolithique et pataude, surtout en début d'album.
L'album contient seize titres pour une durée avoisinant les quatre-vingts minutes. Le mieux étant souvent l'ennemi du bien, le disque aurait certainement gagné à être moitié moins long. Si l'intérêt est constant jusqu'au mélancolique 'Nowy Wiek', il s'effiloche sur la dernière partie, le plaisir suscité par la découverte des premiers titres cédant inexorablement la place à l'ennui d'un procédé devenu finalement trop prévisible. "SBB" reste au demeurant un album d'une écoute facile et agréable, idéal pour se détendre comme musique d'ambiance en fin de soirée.