Contrairement aux idées réçues, tenter de faire son trou au sein d'un genre qui a le vent en poupe, n'est pas chose si aisée car on a alors tôt fait d'être avalé par la masse de courtisans sans imagination ni panache à la remorque d'une poignée de têtes de gondoles. Ce constat se vérifie nettement avec le Gothic metal dit " à chanteuse", dont on collectionne les specimens par palettes entières.
On craignait qu'Elyose, jeune pousse née en 2009 avec alors deux "l" à son patronyme, viennent compléter cette litanie de banals suiveurs. La pochette un peu cheap car sans recherche (bien que la silhouette qui s'y détache se veut des plus agichante), de Théogyne, son premier effort longue durée, que précédait une démo répondant au même nom, ainsi que le joli minois de sa chanteuse, Justine Daaé, n'auguraient de fait rien d'exceptionnel dans cet horizon bouché. La (bonne) surprise n'en est ainsi que plus grande, ce galop d'essai pouvant être considéré comme une des meilleurs sorties hexagonale que le genre nous ait offert ces derniers temps. Ni plus ni moins.
Bien que devenu un vrai groupe à part entière, nombre de détails trahissent l'origine bicéphale et vaguement electro d'un projet au départ seul joujou de la jeune femme et du multi-instrumentiste Ghislain Henry, alors en charge de tout le reste et surtout du programming. "Elévation" et ses couleurs synthétiques, pas si éloignée que cela du Paradise Lost époque One Second/Host, affiche par exemple les oripeaux de ces débuts.
S'ils ne s'éloignent jamais vraiment des invariants que le Gothic Metal traîne comme un boulet, et notamment le recours à ces jarretières cousus avec des riffs assez lourds ("Mirry Dancers"), les Franciliens les exploitent avec naturel, ne cherchant pas à révolutionner à tout prix un style qu'il honore sincèrement. Surtout, ils possèdent dans leur corset deux atouts de choix...
D'une part, une qualité d'écriture et d'arrangement indéniable, et tout à fait respectable eu égard aux moyens en oeuvre forcément plus modestes que chez certains de leurs concurrents européens. "L'orientale" et son emphase symphonique, "le libérateur", "Les artisans du chaos" au joli refrain ou bien encore le morceau éponyme constituent une charmante collection de petites perles, palmarès à peine assombri par de rares pistes plus quelconques mais qui évite les fades et (trop) convenues roucoulades. D'autre part, alternant le français (surtout) et l'anglais (un peu moins), Justine s'impose comme un petit bout de voix aussi délicieux et sucré que puissant. Omniprésente, elle tire Elyose vers le haut, lui conférant un charme candide que voile néanmoins une mélancolie diffuse.
Les amateurs de chant féminin et de Metal gothique et moderne ne peuvent s'abtenir de ce groupe des plus prometteurs et de ce Théogyne en tout point honorable.