Touche à tout de génie - mais oui, pourquoi pas ? -, aussi à l'aise avec une guitare entre les mains qu'une basse, une batterie ou divers synthétiseurs, Sula Bassana est un musicien complet dont l'inspiration foisonnante nous ferait presque suspecter chez lui l'absorption massive et régulière de quelque substance illicite. Bordélique, sa discographie dégueule de partout et ne cesse de grossir quasiment chaque mois, entre les efforts d'Electric Moon, de Zone Six (pour les plus actifs du moment) ou sous son propre nom. Tout seul, en effet, il bricole aussi des galettes naviguant quelque part entre Space-Rock, musique électronique et Krautrock.
Très différent de son stratosphérique et lumineux prédécesseur (The Light), Kosmonautslui permet de donner libre court à sa passion pour les claviers et séquenceurs en une orgie spatiale dont les teintes colorées nous rappellent les travaux d'Ozric Tentacles ("Thora"), un autre habitué des paradis artificiels. Peu de guitares cette fois-ci, ce que certains regretteront, encore moins de chant mais un déluge de sons synthétiques et de bidouillages ad hoc.
Bien que toujours emporté par ces oscillations hypnotiques coutumières de l'Allemand, l'album, comparer à The Light, pourra frustrer quelque-peu. Dans un premier temps seulement, car une fois confortablement installé dans le vaisseau spatial, on se laisse ensuite facilement bercer par ces pulsations obsédantes dont le caractère ultra-répétitif les rend proche d'une transe cosmique. Piloté par une Drumbox et des boucles électroniques,"Stellar Star" illustre avec brio cette facette où pointe, comme souvent avec Sula Bassana, un souffle ethnique.
Autres traits distinctifs du personnage, un bien-être en même temps qu'une réjouissante générosité, auréolent ce voyage dans les étoiles qui confine à une forme de plénitude, voire plutôt même de zénitude, à l'image du lent bouquet final "Pygar", seul titre où la guitare aérienne du maître des lieux se fait entendre sur fond de nappes envoûtantes tapissées par ces synthés aux accents atmosphériques. Proche des morceaux parsemant The Light, il emporte Kosmonauts sur une vague Ambient à la beauté immense qui n'est pas sans évoquer Klaus Schulze, l'achevant de la plus superbe des manières. Assurément le meilleur moment de l'écoute.
Entre cette dernière piste et les effluves trippantes du gigantesque "Barbarella" en ouverture, l'album erre dans un espace utilisant plusieurs tessitures électroniques, démontrant si besoin en était encore, le talent de Sula Bassana dans sa diversité d'une inspiration nourrie à la SF et au Krautrock. Mais on préfère quand-même lorsque le bonhomme braconne sur les terres psyché ou plus progressives, comme en témoigne ce "Pygar" décidément magnifique...