KO-LO-SSAL ! Comment résumer autrement qu'avec un tel adjectif l'objet, pour ne pas dire l'œuvre d'art, dont il va être question dans la présente chronique ? Attention au décollage, voici les chiffres de la démesure : 3 heures de musique réparties sur 3 CD réunis en un seul album, 3 années de travail depuis ce qui ne devait être qu'une parenthèse, une respiration (l'album Under) avant de terminer la trilogie dédiée à Claude Monet (dont on se demande désormais si le dernier volume verra le jour), 51 titres composés et interprétés par à peu près autant d'artistes, que dis-je, des pointures, pas loin de 70 instruments électriques et traditionnels utilisés, le tout servi avec un livret encyclopédique de 74 pages richement illustré et documenté, justifiant à lui seul l'achat d'une version physique. Et tout cela pourquoi me direz-vous ? Pour raconter la vie extraordinaire de Monsieur Charles Darwin, celui qui bouscula bien des certitudes et qui aujourd'hui encore, s'avère être le pire cauchemar de ceux que l'on appelle les créationnistes et qui continuent à nier l'évidence démontrée par stravaux. Avant même d'avoir posé une des trois galettes dans le lecteur, il est carrément impossible de rester insensible à la qualité de l'ensemble et au travail de titan qui en a permis l'éclosion.
Impossible bien entendu de décrire ici chaque titre en détail. De même, il sera compliqué pour l'auditeur d'enchaîner les trois heures de musique, tant la densité musicale de l'ensemble s'avère élevée. Le premier CD renvoie aux meilleures heures du groupe, et notamment à leur premier album, The Lost Frontier, avec un patchwork mélangeant musique oldfieldienne, progressif symphonique, titres traditionnels réarrangés ou parties d'inspiration médiévale, chansons popisantes ou passages façon Yann Tiersen. Les deux autres parties, un tantinet moins dynamiques, verront également l’introduction de parties world, suivant ainsi la trame des voyages de Darwin. Le foisonnement musical ici présent de même que la foultitude d’instruments utilisés rend difficile la catégorisation d’une telle œuvre. Néanmoins, un thème récurrent repris sous la forme de douze (tiens donc) Collection instrumentales réparties tout du long des trois CD permet à l’auditeur de reprendre pied régulièrement. L’ensemble alterne ainsi intelligemment titres instrumentaux et chantés, n’engendrant aucune lassitude et renouvelant sans cesse l’intérêt de l’auditeur. Et, malgré la durée conséquente de l’œuvre et d'inévitables longueurs, il est même arrivé à votre serviteur de regretter le manque de développement de certaines plages, qui auraient encore gagné à se prolonger quelque peu (après tout, il reste encore 20 minutes disponibles sur chaque galette !).
Autour du "noyau dur" du groupe, dont Thierry Moreno, hélas disparu depuis, XII Alfonso a fait appel, nous l’avons dit, à une pléiade de musiciens et chanteurs, impliqués tant dans l’interprétation que dans la composition de certains titres. Et, contrairement à d’autres réalisations où la présence de "guest" est bien souvent anecdotique et ne sert qu’à rehausser le blason du groupe, les invités s’avèrent ici un véritable plus pour la musique du groupe. Un exemple parmi tant d’autres se niche dans les interventions confinant parfois au sublime de John Helliwell, LE saxophoniste de Supertramp, dont chaque note colle des frissons le long de la moelle épinière.
Au moment de conclure cette chronique, comment ne pas souligner la formidable abnégation des différents membres de XII Alfonso qui, en ces temps de disette de l’industrie musicale, sont allés au-delà de toute logique commerciale pour offrir à tous ceux pour qui la musique se conjugue avec art et émotion (et non pas zapping débilitant) un formidable présent tant sonore que visuel, rendant par la même occasion hommage à l’un des plus grands hommes de l’Histoire ! Chapeau bas messieurs dames !