Si en France, son nom peut faire sourire, évoquant alors un célèbre comédien, Arditi ne rigole pourtant pas vraiment. Marten Björkmann et Henry Möller, l'hydre à deux têtes qui le commande, font même partie des artistes qui ont su le mieux ériger une architecture martiale, à capturer cette essence totalitaire indissociable des régimes fascistes de l'entre-deux-guerres et surtout du IIIème Reich dont les Suédois s'inspirent, sans pour autant rejoindre clairement les groupuscules du NSBM, ne serait-ce déjà parce que, si connexion il y a - on songe bien entendu à leur collaboration passée avec Marduk -, le matériau sonore sculpté par Arditi n'a rien à voir avec du Black-Metal.
Mais, en préférant aux artifices métalliques une plastique Ambient et froide comme la pierre, constituée de sonorités guerrières et de roulements de batterie comme échappés d'un champ de bataille, et de bribes vocales, murmurées ou scandées tel un discours envenimé, le projet résonne d'une dureté toute militaire cent fois plus inquiétante que bien des assauts barbares dégoupillés par les porte-drapeaux de l'Aryan Black Metal.
Après plus de dix années d'activisme et cinq offrandes (sans compter les nombreux EP et un split partagé avec Signa Inferre), Arditi a encore la capacité de progresser, de ne pas se répéter, enfermé qu'il est pourtant dans une niche aux perspectives d'évolution à priori assez limitées et, ce faisant, de nous étonner. C'est ce qu'il fait avec Leading The Iron Resistance aux accents encore plus symphoniques (dans le sens noble du terme) que ses prédécesseurs au point de lui conférer des allures de bande originale de film ("Arming For War").
Les envolées quasi wagnériennes de "Forging A New Man", la dimension opératique de "We The Unity, You The Man", la beauté grandiose de "Leading The Iron Resistance" et la noirceur tragique de "Volunteers" contribuent notamment à la réussite de cet album où éclate le talent visionnaire de ses auteurs en même temps que cette puissance d'évocation phénoménale. Ecouter cette œuvre revient à plonger dans ces temps sombres cependant que le concept du surhomme explose littéralement de ces pistes d'une flamboyance grise et austère.
A l'image des statues habillant son livret, Leading The Iron Resistance a quelque chose de ces colosses de marbre représentatifs d'un art totalitaire. Fidèle autant à son écriture qu'à son identité, Arditi enfante encore une fois un chef-d'œuvre de musique martiale, assemblage de sonorités glaciales que fissure une puissance d'une gravité ferrugineuse.