Après "Argus", aérien et délié, exploratoire et flirtant avec le progressif, Wishbone Ash revient à un rock plus tellurique dans un quatrième album tout simplement intitulé "Wishbone Four". De l'aveu même de Martin Turner, le groupe sait qu'après le succès d'"Argus", son public attend de lui un digne successeur. Mais fort sagement Wishbone Ash prend la décision de se détacher de son chef d'œuvre et de revenir à un rock plus simple.
Une simplicité qui se retrouve déjà sur la pochette, présentant le portrait des quatre musiciens dans un cadre d'un vert épinard du meilleur goût. Abandonnant toute velléité conceptuelle, "Wishbone Four" se veut un recueil de chansons au format classique couplet/refrain/pont, sans digressions superflues. Il en résulte un album honorable, qui s'écoute sans ennui mais qui manque sensiblement d'identité tant il aborde de styles différents, même si Wishbone Ash excelle dans chacun. On retrouve ainsi pêle-mêle du Hard-Rock à la Led Zeppelin ('So Many Things To Say'), du vieux rock'n'roll façon Caravan ('No Easy Road'), du rock coup de poing genre The Who ('Doctor'), du rock country style Eagles ('Sing Out The Song'), la patte Wishbone Ash ne se retrouvant réellement que sur les deux ballades folk 'Ballad Of The Beacon', et surtout l'excellent 'Sorrel' qui aurait mérité de figurer sur "Argus".
Les duels de guitares et les harmonies vocales qui ont si bien fonctionné sur les précédents albums sont malheureusement absents de ce disque, ce qui explique largement le sentiment de frustration procuré par l'écoute d'un album qui ne contient pourtant que des chansons plus qu'honorables. Même 'Everybody Needs A Friend', un slow languide idéal pour draguer les filles dans les boums des années 70, et 'Rock'n Roll Widow', un rock un peu mou sans véritable empathie, ne déméritent pas vraiment et s'écoutent sans effort.
Au final, "Wishbone Four" souffre du syndrome qui frappe tous les disques ayant la malchance de paraître après la grande œuvre d'un groupe et qui sont jugés à l'aune de celle-ci. Sans crier au génie, cet album reflète néanmoins un certain état d'esprit propre aux années 70.