Ceux qui ont suivi la scène prog metal florissante des années 1990 se souviendront vraisemblablement encore de Dreamscape, combo allemand qui nous avait notamment gratifié d’un excellent "Very" ! Cet album dans la lignée d’un Dream Theater avait créé un enthousiasme quasi-unanime de la presse metal. Malheureusement, la suite des évènements fut loin d’être aussi réjouissante et il a fallu attendre six longues années et de multiples changements de line-up pour mettre fin à cette fin du silence avec le très agréable « End of Silence » suivi trois ans plus tard du semi-échec "5th Season".
Alors que nous pensions que le groupe fondé en 1986 par Wolfgang Kerinnis avait trouvé une certaine forme de stabilité, ce fut une surprise de constater qu’en 2012 - à l’occasion de la sortie de ce "Everlight" - il ne reste plus aucun membre ayant participé au précédent album ! Et c’est à croire qu’une malédiction plane sur Dreamscape notamment au rayon chanteur ; ayant pensé trouver la perle rare en la personne d’Erik Blomkvist (ex-Platitude), Wolfgang Kerinnis a dû se résoudre à engager un deuxième chanteur en la personne de Francesco (Frank) Marino pour palier aux problèmes de santé d’Erik !
Mais rassurez-vous, le but de cette chronique et de cet album n’est pas de faire pleurer dans les chaumières comme pourrait le laisser penser l’instrumental symphonique introductif, "Final Dawn". "Restless" se charge de sécher les éventuelles larmes avec son prog metal de haute volée technique ! Mais ceux qui s’attendent à un ersatz de Dream Theater comme ils ont (trop ?) souvent été résumés en seront pour leur frais à l’instar du solo mélodique et inspiré évoquant plus Steve Lukather qu’un John Petrucci !
Comme pour mieux brouiller les pistes et rendre la monnaie de la pièce aux mauvaises langues qui l’ont souvent catalogué au rang de sous-Dream Theater, "Led Astray" nous renverrait plutôt un prog metal aux accents symphoniques made in Germany et plus précisément Vanden Plas sur lequel Frank Marino pose de superbes lignes vocales dans un registre nous renvoyant au travail de Jorn Lande dans ses divers projets ! Dans ses malheurs, Wolfgang Kerinnis a toujours su rebondir et nous étonner en s’entourant de chanteurs talentueux au rang desquels on trouve Hubi Meisel qui a su se tailler une petite renommée dans le petit monde du prog metal européen !
Par la suite et dans un registre plus conventionnel, "Fortune And Fate" perpétue l’idée que l’on peut avoir du prog metal des années 1990, échevelé et aux breaks techniques à souhait. Cette démarche - à peine entamée par le passage obligé de la ballade "The Violet Flame Forever" - atteint son paroxysme sur le gigantesque "A Matter of Time Transforming" où tout y passe : soli de feu de David Bertok ou furieux de Wolfgang Kerinnis, breaks étourdissants et plus particulièrement la performance éblouissante de Titta Tani dans un registre "soul" pour ne pas dire "r’n’b"…
Si par moments, "Everlight" peut sembler retomber dans les travers d’un metal progressif à l’originalité inversement proportionnelle à la qualité technique de chacun de ses membres ("One", "Breathing Spaces"), à l’inverse, d’autres titres comme le fantastique instrumental à tiroirs "The Calm Before the Storm" et son sublime successeur "Refugium In Db-Major", tout en subtilité, enthousiasmeront aussi bien les adeptes pur et dur du genre que ceux à la recherche de sensations fraîches !
Vous l'aurez compris, malgré un bon contenu, ce n'est toujours pas en 2012 que Dreamscape figurera au panthéon des groupes incontournables dans son style de prédilection. Mais la persévérance avec laquelle Wolfgang Kerinnis mène avec talent son groupe force au respect et mérite que nous lui accordions tout l’intérêt qu’il se doit !