Qu’il est (heureusement) loin le temps où les formations hexagonales avaient raison de rougir face aux productions américaines, anglaises ou allemandes. Un professionnalisme s’est imposé, même chez les petits. Prenez par exemple Denizen. Du mastering confié au maître Nick Zampiello (Caldera) en passant par le visuel soigné et particulièrement réussi dû à Jimbob Isaac (Neurosis, Orange Goblin), vous pourrez chercher longtemps une quelconque trace d’amateurisme chez ces gars venus de Montpellier dont le métier saute aux oreilles.
Whispering Wild Stories est leur troisième enclume, et cela s’entend. Il est un cocktail énervé mêlant Hardcore pour le chant de Fabien Aletto, et Stoner lourd et épais comme un cassoulet, le tout mouliné avec une énergie immédiate et communicative. S’il pourra évoquer, certes de manière lointaine, Allhelluja lorsque les Italiens étaient encore emmenés par les vocalises rageuses de Jacob Bredahl, l’influence des années 70, apporte à Denizen une fraîcheur très particulière. Zébré par un solo qui semble s’être échappé de cette glorieuse période et s’achevant sur un final au bon relent d’une wah-wah qui miaule de plaisir, "Under A Dress" illustre bien cette référence. En outre, on sent par moment aussi remonter à la surface des sédiments bluesy, à l’image de "Sunshine Of Your Love", en fait une reprise plutôt Heavy de Cream !
Avalant sa petite trentaine de minutes seulement sur les chapeaux de roue, Whispering Wild Stories défile très vite, emporté par un torrent électrique. Du coup, les gars maintiennent une intensité qui jamais ne retombe, qualité qu’ils doivent pour beaucoup à leurs racines Hardcore, lesquelles leur permettent de ne pas mollir en cours de route. Le seul bémol, encore que celui-ci reste assez minime, vient d'un chanteur qui s’époumone de façon trop linéaire mais qui ne suffit pas à freiner l’enthousiasme qui s’impose durant l'écoute de cette poignée de morceaux s’enchaînant à un rythme infernal.
Whispering Wild Stories, dont on aime la grosse patte un peu velue, est un album dont le caractère sauvage n’étouffe pas un gros travail d’écriture, simple peut-être, accrocheur incontestablement, mais plus élaboré qu’il n’y paraît. Il ne lui manque au final qu’un peu plus de charme et d’ambition sans doute, pour marquer encore davantage les esprits.