Après deux albums diversement appréciés dans lesquels Sonata Artica se plaisait à chercher, à expérimenter et tentait louablement de sortir des sentiers battus, certains attendaient le groupe au tournant. Avec une formation stabilisée, quelle allait être la direction prise par le groupe... Continuer dans une démarche plus expérimentale ou progressive ? Revenir aux sources du speed mélo, réintégrer des soli de guitares à foison et laisser libre cours à la prédominance des claviers ? Ou bien tenter un mariage homogène des différentes approches comme le balbutiait l’album précédent ?
La première écoute se révèle plutôt mitigée, mais laisse entrevoir un net retour des guitares sur quelques titres plus classiques, un travail sur les chœurs et quelques tentatives originales comme l’introduction réussie au banjo sur "Cinderblox". Pour le reste, la voix de Tony Kakko se veut un peu trop souvent agressive et les mélodies n’accrochent pas immédiatement, mis à part peut-être le très beau "I Have The Right". Les passages plus heavy ("Somewhere Close To You") alternent avec ceux parsemés de claviers ou de piano qui leur donnent parfois une dimension presque symphonique. Mais écoute après écoute, l’album grandit, laissant place à quelques belles réussites.
Revenons sur "I Have The Right", le premier single ! C’est une sorte de mélopée répétitive, mais très prenante, gorgée d’émotion et dont le sujet dépasse celui habituel des groupes de métal : les droits de l’enfant. Le clip vidéo vaut également le détour. Parmi ces réussites, citons deux titres qui reviennent aux sources classiques de Sonata Artica et qui mettent tout deux bien en avant la guitare : le titre d’intro ("Only The Broken Hearts"), et "Losing My Insanity". Plus aventureux, "Shitload Of Money" laisse pourtant une impression mitigée malgré son refrain facile et insidieux. En effet, les chœurs originaux côtoient une rythmique qui ne fait vraiment pas dans la finesse.
Outre deux ballades sans vice ni vertu, une puissante et l'autre plus délicate, l’album se termine sur deux pièces de 8 minutes où Sonata Artica renoue avec une approche plus progressive de sa musique. Reprenant le titre "Wildfire" paru sur "Reckoning Night", il le développe en deux parties. Il y a de bonnes idées dont l’intro "fête foraine", le mélange classique mais réussi d’agressivité et de mélodie Walt Disney ou encore les chœurs, mais pas assez pour combler 16 minutes d'écoute.
Pour leur septième album, les fils prodigues du métal mélodique reviennent donc avec un album en demi-teinte, emprunt de la volonté de satisfaire à la fois leurs aspirations musicales et celles de leurs fans. Si Le grand écart n’est pas tout à fait réussi, il a le mérite d'avoir été tenté...