Auteur d’un premier EP en 2008 puis d’un album en 2010 Doberman [Crew] est de nouveau présent avec ce "Le Grand Soir" et par là même affirme un style qui semblait assez flou depuis sa formation.
Avec un line-up enfin stabilisé, le groupe s’est débarrassé des fioritures pour basculer profondément dans une mouvance punk / hardcore / metal fusion de fort bon aloi. Avec un brailleur comme Keefran – parallèlement auteur des textes souvent éructés sous forme de rap - harangueur de foules par excellence, le combo a en son sein un fort pourvoyeur de messages. De plus, quand le déferlement sonore se met à l’écart ("Retour De La Monnaie – Part 1") il est encore plus aisé de saisir cette force parolière portée par le frontman.
Mais il ne faut pas s’y tromper, les autres membres assurent eux aussi. La section rythmique transpire et apporte sa sueur à l’œuvre et, si le niveau demandé n’est pas au sommet de l’art, le guitariste crache les décibels.
Pour ce qui est de la musique la recette est à mi-chemin entre Tagada Jones, Parabellum voire les Bérurier Noir notamment avec "Walk Or Die" dégoulinant d’énergie comme ces derniers savaient le faire lors de leurs concerts. Les intros sont majoritairement tonitruantes utilisant très souvent des loops de synthés aux relents industriels ; le remix de "Funambule" en porte d'ailleurs les stigmates sur sa longueur.
Le déluge sonore est un cran au dessus de Rage Against The Machine avec, en point d’orgue "Marche Au Pas". Là où RATM penchait de manière évidente vers une recherche radiophonique, Doberman [Crew] prend le pas inverse et ne propose aucun temps mort laissant finalement l’auditeur exsangue à l’issu des 13 titres que contient sa galette.
Mais ce qui peut faire basculer le relatif anonymat national du combo vers une reconnaissance beaucoup plus générale est son réel talent pour transcender un style encombré par de très nombreux groupes ayant bien du mal à percer. Les paroles sont percutantes car portées par un tissu musical aux mailles hyper serrées faisant office de tamis ne laissant passer que le meilleur. "Lettre Aux Fusillés", au calme relatif, en est l’exemple le plus probant faisant penser à un Noir Désir plus que survitaminé (Mes chers enfants, je vous quitte bien jeune / Mais je vous laisse le meilleur devoir d’être les dignes enfants d’un homme qui voulu lutter).
Doberman [Crew] signe donc un brûlot digne des plus grands noms et risque rapidement de répandre son énergie et sa classe malicieuse à vitesse grand V. Nous leur souhaitons donc une rapide reconnaissance nationale qui ne pourra qu’être largement méritée au regard de ce "Grand Soir" percutant et incisif.