Avant d'être ce monstre du hard FM et de l'AOR que les gens connaissent bien, notamment outre atlantique, Journey a montré un tout autre visage musical sur ses deux premiers disques. Le premier, éponyme, voit le jour en avril 1975 et montre une formation très fortement influencé par le rock progressif, le Hard-Rock de l'époque, entre Deep Purple et Uriah Heep, et même le jazz sur plusieurs passages instrumentaux.
Chanté par Gregg Rolie, également clavier, ce disque très court, 7 titres pour 37 minutes, ne manquera pas de surprendre les auditeurs habitués aux sucreries radiophoniques que composera Journey plus tard avec Steve Perry au chant. Mais pour autant,il ne faut pas ignorer cette première vie du groupe. Sans être d'une originalité absolue, les influences et le son sont très dans l'air du temps des années 70. Ces chansons sont agréables à écouter et montrent que le groupe était déjà très au point musicalement et avait déjà le chic pour composer des mélodies efficaces.
Ainsi, nous avons d'abord du hard classique avec "On A Lifetime" et "To Play Some Music". Le chant est correct sans être extraordinaire, mais c'est bien l'ambiance musicale, avec pas mal d'orgues Hammond, qui fait la différence. La première, qui ouvre l'album, étant de grande qualité avec un début très soft puis l'arrivée d'un son plus hard à la Deep Purple. Dans cette optique "Mystery Moutain" a tout d'un hit en puissance, elle est d'ailleurs toujours dans les chansons favorites des fans du groupe, avec son riff simple et efficace, sa basse largement mise à l'honneur et un excellent soli de Schon, rapide, technique et très Hard-Rock dans l'esprit .
Mais le cœur de l'album vient de ses deux instrumentaux de grande classe, "Koboutek" et "Topaz", sur lesquels Schon étale une classe énorme avec sa guitare, passant d'un registre hard à un registre jazzy plus barré avec une facilité déconcertante, avec quelques passages plus progressifs remplis de feeling. Enfin nous trouvons des morceaux plus éthérés et mélancoliques comme "In My Lonely Feeling" et "In The Morning Day" qui collent à merveille au chant de Rolie. Ce dernier insuffle à ces très belles chansons un souffle de vie très fort et un supplément d'âme qui donne le frisson.
Certains trouveront peut-être ce disque un peu daté ou vieillot. Il n'en demeure pas moins qu'il dégage un charme certain, celui de l'innocence d'une formation encore jeune et symptomatique d'une époque révolue. Bien sûr, Journey a fait mieux dans sa carrière que ce premier album, mais malgré, tout il mérite l'écoute pour comprendre le parcours du groupe et tout simplement parce qu'il est de qualité.