Fort d'une œuvre entamée il y a moins d'une dizaine d'années, et bordélique à souhait où splits par palettes entières (avec en vrac Hypothermia, Nortada Gelada...), demos (six au total), EP (A Soul Departed To The Unknown) se succèdent à un rythme frénétique, Black Howling s'est imposé comme un artisan majeur du Black Metal d'obédience dépressive, ce qu'a confirmé un premier essai remarqué en 2007 (Alma... Uma Floresta De Dor).
Cette réputation, les Portugais la doivent à un solide sens du spleen et au respect des principaux invariants du genre nourris au terreau 'burzumien' et à ses rejetons (Striborg, Xasthur...), mais pas seulement, car les deux misanthropes que deux simples lettres identifient (A. et P.), possèdent au moins deux qualités qui les distinguent fortement du tout venant des escadrons du suicide coutumiers de nos platines dont ils poissent plus ou moins la surface.
Tout d'abord dans la forme, en privilégiant les longues parois dont ils aiment à (re)pousser la durée jusqu'à son paroxysme. Certes, ils ne sont ni les premiers ni les derniers à tenter de faire exploser l'échelle de Richter de la lenteur suffocante, mais le fait qu'ils enlisent leur art d'une croûte ultra-primitive, raw et désaccordée, confère à ces interminables suppliques des allures de calvaires infinis. Les guitares trempées dans la rouille affreusement cradingues ("The Shadow I'm Meant To Be"), une batterie qui ne file jamais droit et un chant qui hurle telle une créature des ténèbres, forment le substrat maladif des deux plaintes d'une vingtaine de minutes chacune remplissant Melancholy Of A Pagan Bucolic Spirit. D'autre part, dans le fond, comme le long titre de cette seconde offrande le laisse deviner, où Black Howling s'abreuve d'un humus autant spirituel et païen que forestier bien que toujours sécrétatoire d'un désespoir immense.
Cru et d'une telle lancinance répétitive qu'il se mue peu à peu en une forme de transe shamanique, cet opus peut à juste titre être considéré comme une des pierres angulaires du Black suicidaire. Il confirme enfin ce sens de la décrépitude désolée dans laquelle sont passés maîtres les Portugais grâce également à Ava Inferi, dans un registre (beaucoup) plus accessible, et plus encore à Ars Diavoli, lequel reste toutefois celui qui sait le mieux plonger dans l'obscurité une journée pourtant écrasante de soleil.