La première partie de son nom, de même que la présence de Jamie Myers (ex Hammers Of Misfortune) en lieu et place de Jex Thoth qui posait ses lignes vocales sur Restored To One, ne doivent surtout vous abuser : Sabbath Assembly n'est pas un énième rejeton de la bande à Tony Iommi. Il ne noue même aucun lien avec une chapelle Doom à laquelle il serait (forcément) tentant de rattacher le duo américain qui, outre la jeune femme, est incarné par Dave Nuss. En fait, il ne s'agit pas d'un groupe comme les autres, ne serait-ce déjà du fait de son concept entièrement dévolu à l'adaptation des textes de la Process Church Of The Final Judgement.
Si l'occultisme vous est étranger, il est alors peu probable que vous ayez entendu parler de ce groupe religieux. Une rapide présentation s'impose donc si l'on souhaite cerner la personnalité tant spirituelle que musicale de Sabbath Assembly. S'inscrivant dans le contexte de la contre-culture des années 60, l'Eglise est fondée par des dissidents de Ron Hubbard et développe une théologie fumeuse où Satan, Lucifer et Jehovah sont les trois dieux de l'univers et le Christ, leur émissaire. Ce sont ses hymnes gospel alors interprétés par ses membres que le combo se réapproprie.
De là découle une musique aussi curieuse que déstabilisante. Plus proche du folk que du Doom voire du Rock tout court, bien malin est celui qui saura la cerner avec justesse. Grâce, notamment, au talent de Jex Thoth, Restored To One fut bien accueillie. Gageons qu'il en sera de même de Ye Are Gods, son frère jumeau. Ce n'était pourtant pas si évident. Sans la grande prêtresse du Doom US, parfaite car conférant à ces 'reprises' des allures de rituel occulte, Sabbath Assembly pouvait perdre une bonne part de cet aura mystique. Pour être différente, la voix de la nouvelle venue apporte un autre cachet, plus hippie peut-être, plus psyché sans doute.
Encadrée par des chants et des prêches incantatoires comme échappés d'un office ("Let Us All Give Praise And Validation", "In The Time Of Abaddon II"), l'œuvre mérite de multiples et attentives écoutes pour être appréciée à sa juste valeur. Un balayage rapide ne pourra rimer qu'avec déception mêlée d'incompréhension, celle de se demander où le groupe peut bien vouloir en venir. Il faut lui donner sa chance car la richesse de Ye Are Gods, bien réelle, ne se livre que par petites touches. Sans bien s'en rendre compte, ces courtes pièces finissent par laisser de profondes stigmates dans la mémoire. Ce sont tout d'abord les plus sombres qui émergent, à l'image de "Bless Our Lord And Master", "We Come From The One" ou "And The Clarion Calls" aux subtiles arrangements. Psyché ("Christ You Bring The End" aux jolies lignes vocales) ou folk ("The Love Of The Gods"), les autres suivent avec un égal bonheur.
Plus que jamais, Sabbath Assembly demeure cette entité singulière qui ne ressemble à aucune autre. Bien qu'inférieur à son aîné car d'une musicalité moins évidente et donc autant capable de magnétiser que de repousser, Ye Are Gods tranche franchement avec la production actuelle - bien que l'on puisse le rattacher au revival sixties/seventies actuel - et rien que pour cela, mérite d'être découvert. Malgré le charme suave de Jamie Myers, il est dommage toutefois que Jex Thoth, plus charismatique, ne l'enténèbre pas de sa voix hantée.