Cultivant tout d'abord un savoureux mélange entre Hard-Rock et progressif, Uriah Heep entame avec Wonderland un virage plus commercial, plus direct également. Cet album est le dernier écrit par le line-up classique bâti autour de Byron/Hensley/Box/Thain/Kerslake, les années qui suivent voyant celui-ci se disloquer peu à peu, parfois même dans des conditions tragiques avec la mort du bassiste Gary Thain.
Suite au décès de ce dernier, John Wetton, que l'implosion de King Crimson rend disponible, est recruté. High And Mighty est, après Return To Fantasy, le second et dernier disque qu'il enregistre avec le groupe. Franchement sous-employé sur l'opus précédent, eu égard à ses performance au sein de la formation de Robert Fripp, l'homme se rattrape un (tout petit) peu avec cette livraison qui, étonnamment, s'ouvre sur une chanson dont le chant n'est pas assuré par un David Byron déjà sur le départ et se noyant de plus en plus dans l'alcool, mais par le bassiste. Il sauve "One Way Or Another" de la banalité à lui seul. En outre, il a cette fois-ci pu contribuer au travail de composition, coécrivant la ballade "Weep In Silence", même si Ken Hensley assume presque à lui seul la paternité de High And Mighty que d'aucuns n'hésitent d'ailleurs pas à considérer comme un disque solo du claviériste.
Encore auteurs de quelques mémorables flamboyances, vocales pour Byron, comme sur le beau "Footprints In The Snow" ou "Can't Stop Singing", et guitaristiques pour Mick Box sur "Name Of The Game" et "Weep In Silence" par exemple, le fait est que ces deux piliers de l'identité si particulière d'Uriah Heep semblent presque ici relégués au rang d'accessoires tant la présence de Hensley parait écrasante, ce que, à l'écoute de "Sundown" et plus encore du grandiose "Misty Eyes", sans doute l'apogée de cet album, on ne regrettera pas.
Malgré tout, et s'il clôt avec Firefly le chapitre le plus brillant de la carrière de ses auteurs, force est de reconnaître que High And Mighty propose un menu inégal, oscillant entre l'honorable à l'image de la courte ballade "Confession" ou de "Woman On The World", et le quelconque ("Make A Little Love" au demeurant agréable et remuant). En outre, les paroles de "Can't Keep A Good Band Down" trahissent sans fard le sentiment désabusé d'Hensley quant à la situation que vit alors Uriah Heep au sein duquel les tensions sont alors grandissantes, cependant que son talent peine toujours à être reconnu à sa juste valeur par des' pisse-copies' qui continuent de ne pas faire l'effort de voir en lui autre chose qu'un sous-Deep Purple.
Au regard de ce contexte peu favorable, le résultat de High And Mighty, opus enfanté dans la douleur, se révèle largement supérieur à ce qu'il aurait pu être.