L'Euplecte à longue queue (appelé également Widowbird) est une espèce de passereau appartenant à la famille des Ploceidae qui vit dans les zones montagneuses d'Afrique australe. La femelle arbore des couleurs brunes ternes alors que le mâle peut changer d'aspect selon les saisons… Houlà ! Mille excuses ! Petite erreur de sujet, attendez, je reviens… Reprenons ! Widowbirds (un bien bel animal tout de même) est un jeune groupe australien qui semble avoir récemment tapé dans les oreilles d’un Tony Joe White impressionné. Il faut dire que Simon Meli, avec sa voix évoquant un Rod Stewart tout jeune, un Paul Rodgers, et par moment un Robert Plant, était l’atout principal de son ancien groupe Oh La La. Accompagné désormais par la guitare de son bon ami Tony Kvesic, les riches et multiples ambiances de claviers de Lachlan Doley, et d’une section rythmique composée de Shane 'Steel' O'Neill et Simon Wiltshire (un groupe qui avait épaulé Paul Weller en 2010), il dispose enfin d’un trame sonore à la hauteur de son talent.
Evoquant tour à tour la musique des Black Crowes, Neil Young et autres Otis Redding, Widowbirds tape dans ce style inusable et indémodable qu’est le Rock-Folk teinté de Country-Blues, laissant une place prépondérante aux guitares acoustiques portées par un groove old-school label rouge. Il ressort de ce "Shenandoah", composé "sur le versant d’une montagne et sur les plaines de l’Ouest", un feeling live et un côté immédiat qui caractérise ces albums enregistrés lors des retrouvailles entre vieux amis. Ainsi, dans un registre Folk classique, le groupe nous régale de titres comme 'Rumble In The Alley" (évoquant le Rod Stewart de 1971), 'Follow Me Down', 'Lay Your Love' ou encore le dou(loureu)x 'Still Life', superbement interprété par un Meli poignant.
Pour varier les plaisirs sans pour autant se perdre en route, Widowbirds nous sert 'Dust And Stone', sorte de Psyché Blues-Rock, et le très bon et dynamique 'Go Down' qui aurait pu trouver sa place sur un des premiers Led Zep si une rythmique limite disco n'était pas venue taper l'incruste. Quand Dylan rencontre Harrison autour d'un peu d'herbe fraiche (sous les pieds et dans les poumons), cela donne 'Sweet Lady Mary' et son Folk psychédélique oriental. Afin d'ajouter un peu de piment à sa musique, Widowbirds a eu l’ingéniosité d’inviter quelques guests, comme sur ce superbe solo de 'Tonight We Ride', ou lorsque John Cass retourne le psychédélique ‘My Time’ d’une intervention de gratte électrique bien sentie. Avec un peu de piano et une rythmique plus chaloupée, Widowbirds nous donne même de la Soul avec un 'Time We Gotta Move On' très Motown.
Difficile de ne pas tomber amoureux d'un tel état d'esprit et d'une telle voix quand on aime les styles précités. Voilà un album emprunt d'une belle maturité et distillant un Folk-Rock original et parsemé d'influences diverses, parfois inédites, mais s'intégrant toujours bien à l'ensemble. La rivière Shenandoah, perdue dans les vallées de Virginie, peut être fière d'avoir prêté son nom à un tel album. Un coup de maître, assurément !