Tout d'abord perçu comme le simple side-project de deux membres, l'un actuel (le guitariste Robin Staps), l'autre ancien (le chanteur et guitariste Jan Oberg), de The Ocean, on mesure maintenant que Earthship est en fait bien plus que cela, soit un groupe à part entière sur lequel il faudra compter. Cette promotion, il la doit autant à des concerts d'une intensité cataclysmique qu'à cette seconde enclume bien plus convaincante que sa devancière, Exit Eden, très solide au demeurant, et à un changement de personnel ne laissant plus planer aucun doute sur le fait que c'est bien Oberg le maître à bord, séparé du gratteux de son ancien port d'attache mais dorénavant secondé par sa femme, la charmante Sabine, à la basse.
Bien qu'allemand de sang, Earthship est par contre américain de cœur, en cela que son Sludge/Doom granitique louche franchement vers la chapelle velue US avec, en sus, cette touche un peu progressive qui n'est pas sans évoquer par moment Mastodon époque Blood Mountain. Malgré son visuel et son nom typés Stoner, Iron Chest repose sur le même substrat que son aîné qu'il propulse vers des sommets que, honnêtement, nous n'attendions pas vraiment.
La force du groupe réside toujours dans cette faculté à tout résumer en cinq minutes. Ce format conditionne l'extrême densité de compos tendues et ramassées, grondant d'une puissance sismique énorme. Si les Allemands alignent, comme des pinces à linge sur fil, la plupart des attributs du Sludge couillu, à commencer par le chant énervé, ils savent injecter un sens de la progression et des harmonies de guitares ("Athena"), imprimant à leurs créations une vraie dynamique qu'alimente également un travail sur les lignes vocales, tour à tour rugueuses ou plus claires et mélodiques ("Teal Trail", "Brimstone").
Enquillant dix titres en quarante minutes, Earthship maintient tout du long une puissance râblée que véhiculent des riffs de mammouth qui écrasent tout sur leur passage. Au milieu, tel un oasis, surgit l'étonnant "Boundless Void", sorte de respiration plus atmosphérique que le reste, aux guitares presque progressives, et sur les entrelacs desquelles plane l'ombre de Mastodon.
Plus personnel que Exit Eden, malgré les références évidentes qui le nourrissent, Iron Chest cultive l'habile mélange entre énergie plombée et démarche évolutive, faisant d'Earthship autre chose qu'un banal artisan de plus au service d'un Sludge/Doom où les (bonnes) surprises ont tendance à se raréfier. Un futur grand ? Pourquoi pas ?