Spyros Charmanis, c’est le nom du présent groupe, mais surtout de son seul et unique membre qui a encore une fois tenu le mixage, le chant, tous les instruments, et surtout la composition de ce second opus, "Wound". Son premier album, loin d’avoir fait l’unanimité, paraissait trop déstructuré et brouillon et affichait une multitude d’influences et d’idées pour un résultat bien trop incohérent. Notre homme a t-il acquis une plus grande maturité musicale ?
Première constatation, "Wound" est un concept-album défini par son géniteur comme "une histoire se concentrant sur un personnage fictif, ses intentions, ses décisions et son parcours". Et comme tout concept-album, il se doit de permettre une compréhension aisée du sujet. Sur ce point, "Wound" est organisé assez étrangement. En effet, les deux premiers morceaux, ‘Pushing The Sky’ et ‘The Great Outdoor’ sont très majeurs, avec un piano largement prédominant, des accroches mélodiques facilement mémorisables et possédent une certaine naïveté. Mais à partir de ‘Entry Wound’, une rupture s’effectue : dans ce court morceau (3 minutes), à la manière d’une symphonie, le thème principal de l’œuvre est exposé, joué à la guitare sur fond de nappes de claviers accompagnés d’une rythmique basse/batterie sautillante et malsaine.
A partir de là, l’album prend toute sa dimension. Si les deux premiers titres étaient des ballades progressives somme toute très classiques, Spyros Charmanis expose ici un style torturé, oppressant, très atmosphérique sans être dénué de complexité et fortement teinté d’ambiances opethiennes. On retrouve également beaucoup du dernier Pain Of Salvation ("Road Salt Two") dans des morceaux comme ‘Subconscious’ ou ‘You’ve Met Someone’, et évidemment, l’ombre de Porcupine Tree plane bien haut au-dessus de cet album. Tous les arrangements très subtils apportés comme les cuivres feutrés sur ‘You’ve Met Someone’, de nombreuses mélodies jouées à la basse, ou encore une multitude de collages sonores et polyphonies très audacieuses, contribuent à créer une ambiance qui met l’auditeur mal à l’aise en reflétant parfaitement les pensées d’un esprit dérangé.
Mais ce qui est vraiment très intéressant dans cet opus, c’est la capacité de nuance dont fait preuve Spyros Charmanis, alternant les passages doux, aériens et des moments musclés (transition entre ‘Better Halves’ et ‘Hinder’)... Et surtout, ce thème de guitare magnifique, qui revient tout au long de ce "Wound", sur ‘Entry Wound’ où il est exposé, ‘Open Wound’ et ‘Exit Wound’ superbe pièce de 10 minutes qui constitue sans aucun doute le sommet de l'album, formant ainsi un superbe triptyque.
Face à un album d’aussi bonne facture, composé et joué par une seule personne, on ne peut que mettre une excellente note. Soulignons de plus l’incroyable travail sonore effectué où chaque instrument trouve sa place et met réellement les compositions en valeur. Si l’on peut néanmoins reprocher certaines longueurs qui gâcheront parfois le plaisir de quelques passages, "Wound" reste un album progressif d'une grande richesse.