Préparé par un nombre colossal de démos (huit au total), Serpents Of The Church était depuis longtemps attendu comme le messie par tous les adorateurs de la déesse Doom qui désespéraient de voir un jour Rote Mare parvenir enfin à offrir à son art de la douleur le support à sa (dé)mesure.
Démarré en 2005 sous la forme d'un one-man band, celui du chanteur et guitariste Phil Howlett, ce qui est devenu un vrai groupe à partir de 2009, nous vient d'Australie, dont on connaît son Hard-Rock (beaucoup), son Black Metal (plutôt bien également), bien moins en revanche sa chapelle Doom. Là-bas aussi, le Sabbat Noir a portant essaimé. Car en effet, comment ne pas songer à la bande de Tony Iommi et à ses fils spirituels, Cathedral et Reverend Bizarre en tête, à l'écoute de ce pavé de plus de 76 minutes ? Difficile tant, des riffs monolithiques comme prisonniers d'une gangue de désespoir à ces accélérations brutales venant rompre la léthargie ambiante, Rote Mare paie un évident tribut à ces figures tutélaires du genre.
Golgotha à la gloire du True-Doom, Serpents Of The Church a quelque chose d'une procession funéraire qui semble ne jamais vouloir prendre fin. Chacune de ses complaintes est une station sur un chemin de croix qui culmine lors du terminal "Children Of The Sabbath", acte dévotionnel puissant dont on jurerait qu'il est une reprise de Black Sabbath alors qu'il est bien plus que cela, vibrant hommage à cette religion, comme en témoignent ses paroles durant lesquelles on s'amuse à repérer noms de divinités (Saint Vitus, Warning) et clins d'œil aux pères fondateurs dont elles alignent les titres de nombreux morceaux ("Spiral Architect", Wheels Of Confusion"...) sur fond de riffs telluriques et de rythmiques pesantes dignes de la paire Butler/Ward.
Plus qu'une question de raison, le Doom est avant tout une question de foi, expliquant en cela les liens très forts unissant aussi bien les fidèles que les prêtres entre eux. Plus qu'une musique, le Doom est une famille que cimentent des valeurs qui ne trompent pas, et dans le genre, Serpents Of The Church est une véritable leçon, ode misérable à la contrition. Sans jamais chercher à les briser ni à s'en affranchir, ce que du reste personne ne leur demande, des hosties telles que "Funeral Songs" ou le titre éponyme, pour n'en citer que deux parmi les sept (seulement) que renferme ce premier opuscule, respectent à la lettre les Tables de la Loi qui fondent notre église, lesquelles reposent sur des tempos d'une lenteur catatonique, contribuant à étirer un canevas d'un monolithisme aussi absolu qu'admirable et que minent une inexorable mélancolie et un impossible pardon. Doom Metal is true metal !