Nouvelle signature du label Pelagic Record, Khoma n'est pas pour autant un puceau boutonneux dont All Erodes incarnerait les premiers émois. Au contraire, le groupe fondé par Johannes Persson et Fredrik Kihlberg, gravite depuis 2003 dans la sphère Cult Of Luna, qu'animent, entre autres, les deux musiciens. Davantage que Tsunami, c'est The Second Wave en 2006 qui a posé les bases d'un Rock massif et (forcément) glacial. S'il distille cette même mélancolie plombée que sculptent dans la terre froide des guitares pesantes, Khoma braconne moins du côté de Cult Of Luna que de celui d'une musique émotionnelle qui n'est pas sans évoquer Radiohead ou Sigur Ros, en (beaucoup) plus lourd néanmoins.
Après A Final Storm qui a déçu, les Suédois livrent deux ans plus tard, non pas vraiment un nouvel opus, mais une collection de titres dont l'écriture s'étale sur près d'une dizaine d'années. Ceci étant, cette élaboration émiettée ne s'entend absolument pas, ces huit morceaux (sans compter un remix de "All Like Serpents", extrait de l'opus précédent) affichant une cohésion étonnante, autant en terme de couleurs que de qualité, au point de donner l'impression d'être issus d'un même processus de composition. Ils ont toutefois tous été enregistrés cette année, ce qui explique leur incontestable unité.
Tout cela est très bien fait et ne saurait susciter la moindre réserve sur la forme comme sur le fond. Le chant, fragile et émouvant, s'il n'est pas des plus personnels car trop inféodé à cette mode de vocalistes misérables à la Thom Yorke, ne reste pas moins maîtrisé de bout en bout, quand bien même on souhaiterait par moment que les Suédois s'énervent un peu plus, sortent de cette froide torpeur. Du coup, ce sont les titres où affleurent le plus l'influence du principal port d'attache de ces musiciens qui font mouche. "Winter Came Upon Us", "Eyes To The Sun" et plus encore "Death Stroes", équilibre parfait entre la puissance minérale de Cult Of Luna et la fébrilité feutrée d'une Pop-Rock intimiste, écrasent les "In Ruins" et autres "Armo", certes beaux mais un peu ennuyeux.
En définitive, All Erodes se révèle être autant l'épilogue, tel que conçu par ses auteurs, que l'idéale porte d'entrée dans l'univers de ce groupe discret à géométrie variable dont on aime la minérale et déchirante beauté d'une musique écartelée entre la glace et le feu.