Chaque groupe, aussi légendaire soit-il, possède dans sa discographie des disques mal aimés par ses fans et mal considérés par les médias. Uriah Heep n'échappe à la règle: dans cette catégorie il avait déjà "Conquest", et peu de temps après, avec "Equator" son 16ème album, il va en posséder un deuxième assez rapidement. La bande de Mick Box, qui enregistre le retour de son ancien bassiste, Trevor Bolder, ne change pourtant pas son fusil d'épaule. En cette année 1985, le Hard FM est au top et Uriah Heep va complètement plonger dedans, confirmant le son de ses deux derniers albums studios. Et c'est peut être ce qui va finalement gêner les fidèles du groupe, car à un titre près, tout est calibré FM, bel équilibre entre Journey et Bon Jovi. Mais si l'on si penche de près on se rend compte que l'on est loin de la catastrophe annoncée et qu'en fait, "Equator" est un album plus que largement valable qui mérite d'être redécouvert.
Il est certes handicapé par un premier morceau très faible, "Rockarama", piètre titre de pop avec des synthés horribles et que ne sauvent ni le chant ni la guitare, sonnant comme un mauvais morceau de Yes des années 80. Car pour le reste, c'est un sans fautes dans le genre, parfaitement calibré FM avec deux ballades et des morceaux accrocheurs et mélodiques. Surtout, la patte de Uriah Heep se fait largement ressentir au travers de la guitare de Mick Box ainsi que dans les harmonies vocales. Dès "Bad Blood", le groupe est très à l'aise. Avec ce morceau, "Angel", "Holding On" ou encore un "Party time" que ne renierait pas Kiss, ainsi que "Skool's Burning" et " Heartache City", c'est le sans faute. On trouve un groupe frais et dynamique qui sait écrire des morceaux faciles à retenir, aux mélodies et refrains imparables et qui donnent la pêche instantanément. De plus, le tout est sans prise de tête avec des paroles très rock'n'roll.
Quant aux ballades, "Lost One Love" et "Poor Little Rich Girl", ce sont deux très belles réussites, très bien chantées et pleines de feeling. La guitare de Box est parfaite, pleurant juste ce qu'il faut, tandis qu'au chant, Goalby fait des merveilles avec un beau mélange de douceur et de puissance, "Poor Little Rich Girl" étant même un des sommets de l'album avec des paroles profondes et des passages musicaux très aériens d'une belle classe. Cerise sur le gâteau, Uriah Heep nous gratifie d'un excellent dernier titre, "Night Of The Wolf", qui sort des influences FM pour retrouver le son classique du groupe. C'est une réussite totale, épique, mélodique et prenant, il aurait eu sa place sur n'importe lequel des grands disques de la formation dans les années 70 tant il possède la même classe musicale que les classiques du groupe britannique.
"Equator" mérite clairement d'être considéré à sa juste valeur tant c'est un excellent disque de Hard FM avec de très bons morceaux à son programme. Certes, Uriah Heep a pondu avant lui tant de grands disques qu'il a peut être tendance à être mis de côté, mais sa fraicheur et sa musicalité en font un très bon cru qui ne mérite pas sa faible réputation. En tout cas, ce disque et ses deux prédécesseurs prouvent aussi que le groupe n'avait pas de leçons à recevoir en matière de Hard FM, rivalisant sans soucis avec les meilleurs du genre.