Jour de tristesse ce 13 décembre 2001 : le guitariste emblématique de Death avait succombé à un cancer. On le croyait en voie de rémission l'année précédente, mais la bête immonde a refait surface. Chuck s'en est allé et Death avec lui, ainsi que Control Denied et surtout un musicien hors pair, et tout un pan de la musique extrême : car ce bonhomme n'est ni plus ni moins considéré que comme l'inventeur du death-metal. Le noir est la couleur qui prédomine sur "Symbolic" et c'est un chef d’œuvre de noirceur, de rage contenue, de technicité, avec des mélodies puissantes, notamment à la guitare solo. Death, c'est avant tout son frontman : Chuck Schuldiner. Aux grès des albums, le line-up a sans cesse évolué, bougé, changé, ou été remanié. Le groupe a néanmoins suivi une évolution constante, depuis un Death-Metal old-school vers une musique plus complexe et progressive. Pour toucher du bout de l'oreille cette évolution, il suffit d'écouter le dernier chef d’œuvre de ce musicien : Control Denied.
Ici nous ne sommes pas en reste : les rythmiques sont millimétriques et chirurgicales, d'une puissance incomparable. La voix de Chuck est éraillée et puissante à souhait, et se situe dans un registre plus aigu que dans les bas-fonds associés à ce style. Quel bonheur de voir la guitare solo voler, ronfler, tisser une trame mélodique, virevolter, avec une petite incursion en acoustique. La batterie dispense de la double pédale en veux-tu en voilà, bastonne des rythmes effrénés et enlevés, parfois assez alambiqués, des breaks étudiés pour soutenir ce rouleau compresseur musical. La force du disque c'est la construction au cordeau de chaque morceau, empruntant parfois à Cynic pour l'aspect éthérée et mystique, mais aussi à Carcass pour la voix, l'esprit thrash et social, ou à Gorguts pour l'incorporation d'élément jazz-rock, et même à Morbid Angel pour l'aspect plus direct. Or ici, ce n'est pas un simple emprunt : les influences sont digérées, magnifiées et réinterprétées. Le groupe s'éloigne du style premier et aborde des thèmes plus orientés vers la philosophie ou la recherche mystique.
Écoutez cet album et vous serez transportés, attirés par le côté obscur de la musique, charmés par la beauté du diable, subjugués par le goût âpre de la révolte, transportés par les moments acoustiques purement paradisiaques. Appréciez ces solos techniques en diable mais tellement plein d'évidence. Rendez l'honneur mérité à son maître d’œuvre. Peut-être qu'à votre tour vous verserez une larme de nostalgie en pensant à ce grand musicien, en imaginant la voie qu'il aurait pu prendre, en rêvant à la musique à la fois extrême et très technique qu'il aurait dû produire.
Alors peu importe que, au contraire du Roi de la Pop, personne n'ait mentionné cette cruelle disparition. Tous les 13 décembre, les vrais fans verseront une larme en mémoire de ce travail dantesque, de ce défricheur, de cet aventurier de la musique: une musique tellement humaine. Ce disque est un chef d’œuvre ni plus ni moins !