A Fleur du mal
Ce disque c'est de prime abord une pochette à vous glacer les sangs : un œil gigantesque, terrifiant et menaçant dans le ciel, comme le regard du démon ou d'une entité satanique, un corps momifié pris dans la toile d'une araignée monstrueuse, en somme une vision de d'horreur et de cauchemar. Justement la musique d'Obituary, c'est ça: le cauchemar à l'état pur, l'horreur faite chair. Ça fait froid dans le dos, c'est chirurgical, c'est effrayant et gorgé de d'hémoglobine. Les riffs sont malsains et d'une profonde noirceur, ils vous percent de l'intérieur (notez la référence), vous transpercent de part en part. Les rythmiques lourdes à l’extrême, lentes, voir même coulées dans le plomb. Les accords dissonants à souhait exhalent une ambiance de pourriture, de fin du monde ou d'apocalypse. Elles vous donnent la chair de poule. Point ici de cadence parfaite ou de résolutions classiques de l'harmonie mais plutôt d'explorations sonores.
La batterie empeste la crasse et la pourriture. Elle est ample, profonde et puissante pour tout écraser sur son passage. Les tempos sont souvent moyens, voir lent, avec quelques accélérations bien pensées : le death-metal à l'ancienne veut se faire plus épique par moments, Cause Of Death en est l'exemple frappant. La basse est ronflante dans les graves, lourde à souhait. Elle fait trembler tout les os d'un corps moribond pour disloquer sa carcasse et faire éclater ses chairs putréfiées. La voix est particulière, même très particulière. Plus éructée que chantée, les paroles sont vomies. Cette voix d'outre-tombe délivre de la crasse, du sang et de la violence comme sur Infected.
Et puis dans toute cette noirceur et cette violence, surnage la guitare solo, magnifique. Un grand nom du genre vient poser des lignes d'une technicité hors pair sur cette musique terrienne même sous-terrienne, cette musique construite, déconstruite ou disloquée. Le poste est tenu par James Murphy. Ô quelles interventions ! Quel bonheur d'entendre ces harmonies dissonantes et mélodiques, très loin de ce que peuvent faire d'autres groupes du genre. Oui, car la lumière vient de ces harmonies bizarres. Vos oreilles seront conquises ou dégoûtées à jamais par ces phrases. On ressent presque l'influence de la musique atonale ou dodécaphonique des plus belles œuvres de Stravinsky. Merci à James Murphy d'élever ce disque au rang de référence du genre. De faire de ce qui aurait pu n'être qu'une série Z horrifique, une référence de l’horreur à vous glacer d'effroi et susciter votre dévotion.
Ce disque, c'est en quelque sorte un croisement improbable entre Les Fleurs du Mal et Stravinsky.