Usant d'une langue connue de lui seul et avare en informations - à peine sait-on qu'il s'agit d'un projet né en 2005 et laboratoire de Dehn Sora du collectif Church Of Ra -, prétendre que Treha Sektori ne facilite pas la pénétration de sa mystérieuse intimité tient de l'euphémisme. Quand les balises auxquelles il est commode de se raccrocher n'existent pas, il ne reste donc plus que la musique. Quoique, bande-son, celle d'une réalité altérée, conviendrait mieux pour qualifier l'art autant sonore que visuel de cette entité fançaise désormais hébergé chez Cyclic Law qui en profite d'ailleurs pour rééditer dans la foulée Sorieh, sa seconde offrande (en vinyle uniquement).
Si cette dernière, par son hermétisme et en dépit d'incontestables qualités, ne nous avait pas totalement convaincu, il n'en va pas de même d'Endessiah lequel retrouve le souffle désincarné de Kaessariah. Heel een Leven Lang de Sembler Deah (projet commun de Dehn Sora et du duo d'AmenRa) ainsi que la démesure glaciale et frissonnante. Envoûtantes, ces six complaintes paraissent n'en former qu'une seule et unique de près de trois quart d'heure impossible à individualiser.
A vouloir les décrire, on se heurte fatalement à la faiblesse des mots, incapables de capturer leur essence. Leur âme également. Dark Ambient fantômatique d'un lyrisme funéraire absolu, Endessiah plonge dans les arcanes de la terre, symphonie crépusculaire dont seule une écoute au casque, dans une pièce avalée par la nuit, pourra en restituer l'éclat obscur et les trésors qui y sont tapis.
Percées par un écho funèbre semblant provenir de très loin, ces pistes reposent sur des nappes de sons hantés qui vous engourdissent autant qu'elles vous envahissent par leur puissance souterraine et tellurique. Oeuvre d'une noirceur abyssale à la dimension à la fois introspective et mystique, Endessiah n'en gronde pas moins d'une froide beauté qui emporte tout.
Après deux essais aux allures d'ébauche, Treha Sektori y trouve enfin un sens, ouvrant la porte d'un univers spectral qui n'appartient définitivement qu'à lui et frôlant de peu le chef-d'oeuvre.