Depuis quelques années, la machine Glass Hammer semble tourner comme une horloge, nous offrant un nouvel album tous les ans (18 mois au pire). Ce "Perilous" n'en est pas moins que le quatorzième en 20 ans, et le troisième avec un noyau dur incluant le très andersonnien chanteur Jon Davison. Le seul changement visible se situe au niveau de l'illustration puisqu'après deux magnifiques dessins haut en couleurs de Tom Kuhn pour "If" et "Cor Cordium", celui de "Perilous", signé R. T. Adolfo est plus sombre, sans doute pour coller au concept de l'album.
Concept, le mot est lâché. De l'aveu même de Steve Babb : "Il s'agit essentiellement d'une vision unifiée ; une idée musicale en treize parties ou mouvements. Les émotions et les idées et les paroles exprimées naviguent sur la musique.". L'histoire est celle de deux enfants perdus une nuit dans un cimetière, de leurs efforts pour en sortir et de leurs rencontres avec des personnages peu recommandables. Les treize pistes vont donc s'enchaîner naturellement, sans césure, formant une œuvre monolithique qui, si vous adhérez au style de Glass Hammer, risque fort de vous capter du début jusqu'à la fin, pour ne pas dire vous captiver voire vous capturer.
Ce groupe, que l'on dit si couramment yessien, surprend sur "The Sunset Gate", lorsqu'après une courte introduction par le trio à cordes Adonia surgit une petit mélodie au piano qui rappelle diablement "The Lamb Lies Down On Broadway". Rassurez vous ou regrettez le, mais cette petite incartade ne va pas durer, car dès que Jon Davison fait entendre sa voix, nous quittons Genesis pour retrouver Yes. Outre le trio sus-nommé, Glass Hammer s'est entouré pour l'occasion de nombreux invités et notamment du Latin Choir dont on peut entendre les chœurs quelque peu liturgiques à la fin de "We Slept. We Dreamed". Une autre invité, Amber Fults charme nos oreilles de sa douce et belle voix sur la ballade "In That Lonely Place", seul titre non chanté par Jon Davison.
Le reste des compositions nous ramène dans les ambiances yessiennes. Il suffit d'écouter les vocaux en chorus et le placement des instruments sur "Beyond They Dwell", "Our Foe Revealed" ou "Where Sorrows Died and Came No More" pour s'en persuader. Il y a du Squire dans les claquements de la basse, du Howe dans les soli de guitare et du Wakeman dans les sonorités et les envolées de claviers, mais tout ça avec la touche personnelle de Babb, Shikoh et Schendel. A noter que le dernier titre cité, qui est aussi le dernier de l'album, débute sur cette petite mélodie au piano tellement genesienne présente sur la première piste.
J'entends déjà les commentaires des puristes du prog qui ne verront dans ce "Perilous" qu'une copie de plus de l'univers yessien et je n'aurais d'autre argument à leur opposer que celui du plaisir. Pour moi, Glass Hammer réussit encore une fois à me faire oublier que le grand Yes qui a bercé ma jeunesse n'est plus.