Bader Nana est un jeune artiste Libanais installé au Koweit. Son premier album 'Wormwood' a la particularité d'être entièrement écrit, interprété et produit par l'artiste lui-même. Il sait tout faire et il le fait bien, il chante (pas mal du tout), gratte (très bien), et bat la mesure (avec une vraie batterie). Loin des clichés orientaux qu'auraient pu laisser présager ses origines, Bader Nana officie dans un registre Rock/Métal progressif proche de Spock's Beard ou Transatlantic. Un domaine techniquement exigeant et un genre passablement encombré, mais le jeune homme a les épaules et le talent pour s'y risquer.
Le talent de compositeur de Bader inonde chaque titre avec une variété insolente. Il nous distille un rock progressif inspiré et intéressant. Chaque titre foisonne d'idées originales, les variations de rythmes et d'ambiances sont nombreuses tout en restant accrochées aux thèmes de chaque morceau. La cohérence de l'ensemble en est étonnante à tel point qu'il est difficile de décrire un titre sans le rattacher à ceux qui le suivent ou le précèdent. Les pistes s'enchaînent souvent à la perfection, ainsi, "Journey" et "Earth 1348" semblent-ils avoir été écrits d'un bloc pour ne former qu'une longue suite progressive, tout comme "All Fall Down" qui est une intro planante idéale à "The Answers".
Quelques titres plus percutants comme "The Plague", "Desperate Measures" et "Quarantine" sont plus typés Metal Prog avec des riffs complexes et syncopés, des chorus de guitare acérés et des breaks où les claviers viennent relayer les six cordes avec des sonorités et des effets originaux. Les inconditionnels du théâtre des rèves ne seront pas insensibles à ces apports, ni à la voix de Bader Nana qui, si elle n'a pas la puissance de celle de James LaBrie, en côtoie souvent les sonorités et la tessiture. Le morceau final de l'album, "Destroyer Of Worlds", est le plus élaboré. Sur 13 minutes, Bader Nana y déroule une belle fresque progressive faite de parties douces magnifiquement chantées, rappelant les mélodies de Steve Unruh (Resistor), et d'envolées frénétiques de guitares virevoltantes et de claviers à la Ayreon. Le final au clavier symphonique et au solo aérien ponctue l'album à merveille.
'Wormwood' est un album riche, envoûtant et abouti. L'œuvre d'un artiste que l'on croirait à l'apogée de sa carrière alors qu'il n'en est qu'à l'aube. Rappelons qu'à 27 ans c'est son premier album et qu'il y fait absolument tout, jusqu'à la production (excellente, soit dit en passant) dans son propre studio. Bader Nana, un nom peu commun pour un artiste prometteur au talent déjà immense. Un nom qu'il faudra retenir pour suivre de près ses prochaines réalisations.