Riverside fait partie des groupes qui comptent dans le domaine des musiques progressives. Et comme pour tout groupe “important”, la parution d’un nouvel opus fait figure d’évènement. “Shrine of New Generation Slaves” est un peu l’album de tous les dangers. Après une trilogie qui a porté très haut la flamme du groupe avec un style d’emblée très personnel, “Anno Domini” avait pu paraître plus routinier malgré une légère tendance au durcissement rythmique (une métallisation plus marquée). Quid donc avec ce “Shrine” ?
Premier point et gage de stabilité, le line-up est inchangé, le quatuor reste intact et sait toujours aussi bien équilibrer les pupitres. Chacun des musiciens est à son affaire, avec peut-être un peu moins de claviers en nappes et de guitare planante, mais pas mal de plages calmes portées par la guitare acoustique, lorgnant souvent vers l’atmosphérique, une tendance déjà remarquée dans le court “Memories in My Head”. Constante également, la très belle présence de Mariusz Duda, que ce soit vocalement ou à la basse, magnifiquement utilisée tout au long de l’album (et notamment sur ‘The Depth of Self-Delusion’, ‘We Got Used to Us’, ‘Deprived’ et ‘Celebrity Touch’).
Mais alors, quoi de neuf chez Riverside ? Un groupe de cette trempe ne peut pas rester confiné dans le même style ... Alors il va picorer dans le voisinage, cherchant ici un style plus rock (‘Celebrity Touch’), là une touche plus pop (‘Feel Like Falling’, avec un côté Muse assez inattendu), là encore un côté atmosphérique (la Porcupine Tree Touch de ‘Depth of Self-Delusion’, un titre qui côtoie même en fin de morceau le Opeth d’Heritage), ou bien un soupçon de symphonisme (la fin légèrement pompeuse de ‘Escalator Shrine’), voire des côtés légèrement trance qui sont la marque d’Anathema (la fin de ‘Deprived’). Cet éclectisme a pour conséquence d’éclater la cohésion générale de l’ensemble : les premiers albums étaient bien plus homogènes que ce “Shrine”. Et curieusement, c’est au septième effort que les influences extérieures sont les plus palpables. Là où il était logique d’attendre un opus solidement identitaire, nous recevons un ensemble plutôt disparate de titres qui proposent des ouvertures nouvelles pour le groupe, mais moins originales.
Pour autant, n’allez pas croire que “Shrine of New Generation Slaves" est un album à délaisser : ‘Deprived’ ou ‘Escalator Shrine’ sont deux excellents titres, très bien construits et riches en détails qui donnent largement envie de réécouter. L’impression globale qui subsiste est celle d’un groupe qui a voulu se faire plaisir en cherchant un coté plus direct (la ballade ‘We Got Used to Us’, moins inspirée que d’habitude, ou le titre d’ouverture, assez banal). Le fan attendait peut-être des titres plus longs et un ensemble cohérent. Mais les groupes - célèbres ou non - doivent-ils rester dans les chemins où ils sont attendus ? La réponse est possiblement dans ce “Shrine” en demi-teinte, une peu en deçà des espérances, mais cependant de très bonne tenue.