Quoi de neuf chez nos amis canadiens de Néodyme (pour ceux qui ne connaitraient pas encore ce groupe, rappelons que Néodyme est constitué de quatre musiciens québécois qui ont à leur actif trois albums, "Le Guetteur" inclus) ? Eh bien, rien ! Ou presque !
Côté line-up, on retrouve Daniel Giguère à la batterie et aux percussions, Maryse Pepin aux claviers, Mathieu Boucher à la basse et Alexandre Champagne à la guitare. Pas de chanteur, Néodyme privilégie l'instrumental. Seules quelques voix parsèment ici et là l'album, le temps d'un effet. La panoplie des instruments s'est également enrichie de flûtes à bec assez discrètes et d'une trompette plus prolixe. Si la guitare électrique et les claviers, piano en tête, nous gratifient de nombreux échanges, la basse et la percussion ne se cantonnent pas pour autant à un rôle purement rythmique et prennent tour à tour le temps de nous surprendre et nous charmer par des digressions jamais oiseuses. La qualité de jeu des musiciens et la multiplicité des instruments permettent au groupe un perpétuel renouvellement entre solos, duos, trios ou tutti.
Côté mélodies, on assiste également à une grande stabilité. Enfin, stabilité n'est peut-être pas le mot qui convient car Néodyme s'amuse, comme sur ses albums précédents, à multiplier les changements de thèmes à une fréquence soutenue. Sur la plupart des titres il n'est pas rare qu'une mélodie remplace l'autre toutes les 20/30 secondes, chaque fragment en soi étant souvent constitué d'un air très répétitif. Pas facile à suivre car les perpétuels changements de motifs empêchent l'esprit de mémoriser aucun thème, la musique étant avant tout destinée à créer une atmosphère.
Tout n'est pas égal. Ainsi 'M. Fraunky' paraît un peu laborieux et 'Sous Prescription' un peu longuet. 'Le Guetteur' prend la tournure d'un jazz-rock inquiétant et syncopé digne de King Crimson ou Art Zoyd, 'Tourbillon Hongrois' (pourquoi hongrois ?) donne le tournis avec sa litanie volontairement idiote et 'Rhododendron en Pantoufles' (quelle imagination pour les titres !) invite à la danse entre samba et techno. Chaque titre déroule ainsi une succession de thèmes plus ou moins incisifs où des instruments émérites nous entrainent dans une sarabande plus ou moins chaotique.
A dire vrai, l'album ne livre pas facilement ses trésors et on peut paradoxalement se sentir agacé par la répétitivité des thèmes et décontenancé par leur multiplicité. Cependant, la force du groupe vient de son pouvoir à transcender sa musique au moment où la lassitude pointe son nez. Une sorte de prescience très efficace. Chaque fois qu'on s'apprête à décrocher, le groupe trouve la mélodie qui fait mouche, le phrasé qui séduit, l'ambiance qui envoute. Les audacieux qui oseront s'immerger dans cette musique surprenante découvriront des musiciens généreux, inventifs, jamais inutilement démonstratifs, qui finiront par les prendre à leur jeu avec leurs mélodies sans queue ni tête et pourtant tellement cohérentes.