Argos est à l'origine le projet solo du compositeur multi-instrumentiste allemand Thomas Klarmann. Si Klarmann fréquente les sphères musicales du jazz dès les 70's, c'est dans les années 90 qu'il s'oriente vers le progressif avec des influences telles que Genesis, Gentle Giant ou Caravan. Au début des années 2000 il rencontre Robert Gozon guitariste-chanteur leader du groupe Superdrama. Quelques temps plus tard, c'est Ulf Jacobs, un batteur-compositeur branché prog, qui vient rejoindre les deux compères, et c'est dans cette configuration de trio qu'ils sortent leur premier album éponyme en janvier 2009.
Sur "Cruel Symmetry", troisième album du groupe, on retrouve Rico Florczak aux guitares, ce dernier ayant rejoint le trio originel pour la sortie de "Circles", leur second effort, en 2010. "Cruel Symmetry" débute par une longue pièce du même nom, étalant sur plus de 20 minutes un rock progressif qui ne doit plus rien au néo. Cette première composition est en fait une suite en 13 parties qui alternent les passages lents avec d'autre à peine plus rapides. Ne cherchez pas ici de montées de guitares saturées ou de synthés dégoulinant d'effets, les harmonies sont souvent acoustiques et toujours claires. Lorsque la guitare est électrique, les soli se font 'latimeriens'.
Les autre titres sont plutôt courts, respectant bien le format du 'Canterbury' originel. Les interventions fréquentes de la flûte et de différents instruments à cordes classiques ramènent clairement au style de Caravan ou de Gentle Giant dans les 70's, avec toutefois un son nettement plus moderne. Musicalement, cette galette est riche en sonorités et en colorations variées. Les guitares vont de l'acoustique folk à l'électrique 'camelienne' en passant par l'électro acoustique jazzy. Le chant, lorsqu'il est en chorus fait penser aux frères Shulman (Gentle Giant), et en solo il se promène entre Sinclair-Hastings (Caravan) et Robert Wyatt voire même une touche de Bowie. Si par moment des réminiscences de Genesis pointent le bout de leur nez, c'est à la période pré-"Trespass" que l'on songe.
Il faut donc, soit être amateur de 'Canterbury', soit avoir une bonne ouverture d'esprit pour pleinement apprécier ce troisième album d'Argos. Le mélange des genres est ici très intelligent et cette alchimie musicale aux dosages subtils est peut-être ce que l'on pourrait appeler du néo-canterbury...