Il faut avoir déjà parcouru les paysages silencieux d'une blancheur immaculée du nord de la Finlande pour apprécier comme elle le mérite la musique composée par Jääportit, projet d'un seul homme, Tuomas Mäkelä, qui, depuis 1998 et quatre albums, en dit plus long sur la terre qui l'a vu naître que tous les dépliants et documentaires touristiques.
Si Kauan Koskematon ouvre sa carrière en 1999, c'est Uumenissa qui le fait connaître, notamment grâce à la promotion du label Firebox, la tête chercheuse locale en matière de Funeral Doom. Coincée entre les sorties respectives de Aarni (Bathos), Forest Of Shadows (Departure) et My Shameful (... Of Dust), cette seconde offrande ne noue pourtant aucun lien avec cet art de la douleur, ni même avec le Metal en général, son auteur se rapprochant davantage de l'Ambient. Une Ambient rêveuse et atmosphérique. Seule sa frissonnante mélancolie l'arrime d'une manière cependant lointaine au catalogue de l'écurie finlandaise.
A l'image des illustrations réalisées par Minna Heinoren, Uumenissa a quelque chose d'une aquarelle teintée d'étrangeté, fantomatique et vaporeuse, presque irréelle. Point de guitare ou de lignes vocales mais un blizzard de synthétiseurs tricotant une myriade de sonorités glaciales et belles à la fois, qui ne sont parfois pas sans évoquer le Klaus Schulze le plus aérien, celui de Moondawn et de Mirage. La première partie de "Huuruportaali" y fait penser notamment.
Dès "Tulien Tuli", le Finlandais prépare l'auditeur à un voyage de plus d'une heure dans ces mystérieuses contrées septentrionales. L'ambiance est hypnotique et sonne comme une invite à la contemplation. Plus l'écoute avance, plus le paysage voit ses traits disparaître, avalés par un linceul cristallin ("Unisena"). Envoûtante, une tristesse diffuse pointe toujours derrière, comme l'illustre le tragique "Vaka Vanka". Cela pourrait être ennuyeux, monotone. Il n'en est pourtant rien car le musicien a recours à une grande variété de sons et de tessitures pour peindre un kaléidoscope d'images à la beauté glacée, des nappes étranges de "Vuaksen", comme échappées d'un orgue, aux effluves rythmiques emportant "Tajuni Uumenten Toa".
Sorte de long poème électronique, baigné d'un halo de lumière bleuté, aux allures de déambulation onirique, Uumenissa se veut le partenaire idéal de soirées solitaires passées à scruter le plafond en contemplant sa vie défiler.