Apparemment satisfaits de leur première collaboration, Herbst et Neige ne tardent pas à remettre le couvert et à enfanter du successeur de .Neon. Un an sépare en effet Agape de son aîné, délais relativement court (de nos jours s'entend) qui témoigne de la symbiose qui lie les deux musiciens et laisse imaginer une inspiration commune entre les deux œuvres. Ce qui n'est en réalité pas tout à fait juste.
Bien sûr, la voix de Neige étant ce qu'elle est, à savoir ce marqueur émotionnel lorsqu'elle est claire, reconnaissable entre mille, ce troisième album porte son incontestable empreinte, moins pourtant que sur .Neon qu'il phagocytait presque au détriment de la personnalité de celui qui reste cependant le maître des lieux. De fait, Agape réalise un recentrage, rééquilibrant la balance entre les deux pôles. Ce qu'il fait en gommant quelque peu les kystes shoegaze qui contribuèrent toutefois à la réussite de la seconde offrande, tout en renouant avec une forme d'agressivité dont le plus évident vecteur se révèle être le choix de faire primer le chant hurlé sur le falsetto fantomatique coutumier du Français. C'est une bonne nouvelle.
Ceci étant, Agape laisse un goût amer dans la bouche. Trop court avec ses petites trente-cinq minutes pour cinq titres dont un instrumental, il a des allures de brouillon, d'ébauche du chef-d'œuvre qu'il aurait pu (dû) être. Il serait tentant de mettre à sa charge le peu de temps qui semble le séparer de son prédécesseur, or plus de deux années se sont en réalité écoulées entre les deux enregistrements.
Bref, Agape déçoit, loin, trop loin, de l'éclat tragique de .Neon. Son démarrage laissait pourtant espérer une réussite (presque) identique, avec "Intrauterin", tout d'abord pulsation noire et hachée qui peu à peu se fait ballade atmosphérique pleine d'une délicatesse dépouillée. Le chant clair y fait sa seule apparition lors d'une partie centrale comme suspendue dans le temps, vibrant au son d'un sustain mélancolique, avant d'exploser en un geyser de colère. Lui succède "Bliss" qui, après une ouverture sur un Black-Metal rugueux et âpre, se pare d'accents jazzy surprenants, épicentre feutrée à l'ambiance pluvieuse.
Inabouti, ce troisième opus n'en demeure donc pas moins intéressant car détenteur d'un charme et d'une atmosphère bien particuliers. Mais Lantlôs a le potentiel pour faire bien plus et mieux que cela. Neige étant plus que jamais fortement accaparé, entre Alcest et Old Silver Key, il est permis de se demander quel sera l'avenir de cette entente franco-germanique...