Pour ce 8ème chapitre, Cradle Of Filth a pris son temps. "Thornography" arrive en effet fin 2006, soit plus de deux ans après un "Nymphetamine" qui avait relancé avec brio un groupe un peu en dérive. Malgré tout, la vie du groupe n'est pas un long fleuve tranquille: Martin Powell a déserté ses claviers tandis que James Mcllroy est déjà remplacé à la guitare par Charles Hedger. C'est donc un quintet qui va nous proposer un disque présentant des thématiques classiques et chères à Dani autour du péché, de la religion et du rapport à la nature. Le tout est bien saupoudré de sexe et de vampirisme. Musicalement la formule reste la même que celle proposée sur "Nymphetamine" avec ce savant mélange d'agressivité black métal et de heavy thrash classique. De plus, la même facette accessible est au rendez-vous par des mélodies de guitares très travaillées. Et le résultat est de bonne qualité avec de très bons morceaux. Certes, "Thornography" ne possède pas de titres phares aux allures de tubes comme c'était le cas sur "Nymphetamine", mais il est très bien construit et sans faiblesse. Surtout, sa plus courte durée évite l'écueil du trop-plein et il n'est pas sans petites surprises, Cradle sortant ici et là de son carcan habituel.
Le début du disque est classique avec une introduction symphonique, pour amener l'ambiance glauque et gothique, puis un titre court, puissant et black dans l'esprit, déboule sans crier gare. "Dirge Inferno" se charge de cette tâche avec soin et une violence assez intense. Ensuite, avec "Tonight In Flames" et "Libertina Grimm", on trouve ces chansons que le groupe aime depuis quelques temps, mêlant adroitement puissance et mélodie, notamment sur les refrains. Le résultat est bon, même s'il reste en deçà d'un "Nymphetamine" ou d'un "Gabrielle" du précédent album. A partir de "The Byronic Man", Cradle sort de sa routine. Ce titre, qui voit la participation de Ville Valo de Him, est surprenant par ses aspects assez martiaux et gothiques, et c'est une belle réussite, la voix de Vallo amenant un côté pop assez décalé et délicieux. Ensuite, "I Am The Thorn" voit carrément le groupe sortir de son black habituel pour un death teinté de thrash, dominé par les riffs très modernes d'un Allender au meilleur de sa forme. De plus, Dani varie les plaisirs osant même des passages robotiques assez inédits, tout cela donnant un excellent titre osé et très frais.
La dernière partie de l'album se fait plus classique avec un bel enchainement de titres assez mélodiques. "Lovesick For Mina" se distingue par de jolis arpèges de guitares en introduction puis par une alternance entre puissance et un ton lent et sombre de belle qualité, le tout permettant aux guitaristes de particulièrement briller. "Cemetery And Sundown", "The Fœtus Of A New Day Kicking" et "Under Huntress Moon" sont classiques du style Cradle de ces dernières années, avec un refrain fort et une mélodie abordable. Finalement, seul le chant hurlé de Dani crée la face extrême des morceaux. Ce dernier alterne chant crié et chant posé et grave comme il aime le faire. Enfin, avec "Rise Of The Pentagram", Cradle surprend encore avec un long instrumental symphonique et épique de grande qualité, avec un feeling hispanisant sur les claviers et un ton heavy classique très prenant.
"Thornography" est un album très solide de la part d'un Cradle Of Filth qui confirme qu'il est devenu mur et adulte. Certes, une fois les surprises passées, le tout est finalement très classique de la marque de fabrique du groupe, mais on ne boudera pas son plaisir de voir que les errements passés ont été oubliés. A présent, on ne voit guère que la routine pour menacer ce bel édifice qu'est devenu le groupe anglais.