Reprenant une tradition désormais bien établie, les Moody Blues proposent pour la troisième fois de suite un concept-album, celui-ci explorant le domaine des rêves, comme le suggère son titre, prétexte à flâner entre quelques chansons poétiques mais assez conventionnelles.
L'album s'ouvre comme ses deux prédécesseurs sur un poème d'Edge, un peu plus long qu'à l'accoutumé et anecdotique sur le plan musical. Lodge ne signe que deux titres peu inspirés, les légers et gentillets 'Send Me No Wine' et 'To Share Our Love'. Pas désagréables mais assez anodins. Si Justin Hayward compose des titres qui ne brillent pas non plus par leur complexité, ceux-ci se parent d'une touche très pop british qui fait mouche à tous les coups. Sa voix chaleureuse fait monter de doux frissons à chaque crescendo et les volutes de la flûte finissent de nous transporter dans une atmosphère rêveuse et romantique. Quand on parle de flûte, Ray Thomas n'est jamais loin, même s'il lui arrive souvent de la délaisser sur cet album au profit de l'harmonica. Le tendre 'Dear Diary' achève de nous faire nager en pleine Beatlesmania alors que 'Lazy Day' se nimbe d'un psychédélisme feutré.
C'est à Michael Pinder que revient l'honneur de nous servir le plat de résistance sous la forme du triptyque 'Have You Heard ? Pt. 1 / The Voyage / Have You Heard ? Pt. 2' enchainé à un autre poème de Graeme Edge, formant une suite musicale de près de neuf minutes. Les deux 'Have You Heard ?' à la douce mélodie canterburienne prennent en sandwich le curieux 'The Voyage'. Ce titre, dont l'intro avec force claviers rappelle par sa percussion martelée le début d'Ainsi Parlait Zarathoustra', détonne tant par le fait qu'il soit instrumental que par son caractère ambitieux, voire emphatique, et par le côté sombre et inquiétant de la musique. Comparé au reste de l'album, 'The Voyage' a assez bien vieilli, son affiliation au classique lui donnant un caractère intemporel.
Car si tous ceux qui ont découvert les Moody Blues dans les années 70 succomberont sans mal au charme suranné de ce disque, il paraitra bien daté, voire démodé à qui l'entendra pour la première fois en 2013. Plus cohérent que "In Search Of The Lost Chord", "On The Threshold Of A Dream" recèle néanmoins quelques mélodies aussi charmantes que désuètes qui émoustilleront l'âme des plus romantiques.